L'Afrique du Sud va devoir agir contre l'effroyable pollution de l'air liée à l'exploitation du charbon, après une décision inédite d'un tribunal favorable aux défenseurs de l'environnement, a confirmé mardi à l'AFP l'avocat qui a porté l'affaire devant la justice.
Dans la région houillère du Mpumalanga (est), l'air est le plus pollué au monde avec des niveaux records en dioxyde d'azote, selon l'ONG Greenpeace. Première industrie du continent, l'Afrique du Sud tire 80% de son électricité du charbon.
En 2019, les organisations environementales GroundWork et Vukani ont assigné en justice le gouvernement pour avoir "violé le droit" constitutionnel des citoyens à respirer un air sain, dans l'affaire dite de "l'air mortel".
L'exposition à des produits toxiques émis par les usines à charbon, comme le dioxyde de soufre, des métaux lourds comme le mercure et des particules fines, a conduit à une "épidémie" de maladies telles que l'asthme, les bronchites, les cancers du poumon, et contribue aussi aux AVC et aux naissances prématurées, selon les organisations.
La pollution atmosphérique a causé entre 305 et 650 décès précoces dans le région en 2016, selon une étude présentée par les ONG.
En 2012, le ministère de l'Environnement avait publié un plan pour la gestion de l'air dans la région. Le tribunal de Pretoria lui a donné vendredi un délai d'un an pour le mettre en œuvre.
"Le gouvernement sud-africain est désormais contraint d'agir", s'est félicité l'avocat Tim Lloyd.
L'Etat "a pris un retard déraisonnable pour préparer et lancer des mesures concrètes", a estimé le tribunal dans sa décision dont l'AFP a eu copie. La justice a reconnu que la mauvaise qualité de l'air dans la région est une "violation du droit constitutionnel à un environnement qui ne nuise ni à la santé, ni au bien-être".
Contacté par l'AFP, le ministère de l'Environnement n'a pas souhaité commenter la décision, affirmant seulement qu'il allait en "étudier les implications".
Le Mpumalanga abrite plus de 83% de la production de charbon du pays et l'entreprise publique d'électricité Eskom y possède douze centrales à charbon. Lors de la COP26 en novembre à Glasgow, l'Afrique du Sud a obtenu 7,7 milliards d'euros de prêts et subventions pour financer une transition énergétique.