Le parti du président, le Mouvement populaire pour la libération de l'Angola (MPLA), au pouvoir depuis l'indépendance du Portugal en 1975, a remporté les élections législatives du 24 août avec 51,17% des voix lors du scrutin le plus disputé de l'histoire du pays.
En Angola, il n'y a pas d'élection présidentielle. La tête de liste du parti vainqueur aux législatives est investie aux fonctions de chef de l'Etat.
Le score du MPLA est le plus faible qu'il a enregistré depuis le premier vote démocratique en 1992. Et s'il conserve la majorité absolue au Parlement avec 124 sièges sur 220, il perd la majorité des deux tiers qui lui permettait jusqu'ici de passer des lois sans le soutien d'un autre parti.
Selon Augusto Santana, de la Fondation Democracy Works, Lourenço risque d'être sous pression pour mettre en oeuvre ses réformes économiques alors que l'opposition sort renforcée du scrutin, sans compter de possibles manifestations dans la rue et des désaccords au sein de son propre parti.
"Il fait face à pas mal de défis", résume auprès de l'AFP M. Santana, par téléphone depuis Luanda, la capitale angolaise.
Lourenço, 68 ans, est arrivé au pouvoir en 2017 à la suite du président José Eduardo dos Santos, qui lui a laissé un pays en profonde récession et gangrené par la corruption et le népotisme au terme de 38 années d'un règne autoritaire.
L'ancien général d'artillerie formé en URSS a lancé un ambitieux programme de réformes pour lutter contre la corruption, attirer les investisseurs étrangers et sortir l'économie du tout-pétrole.
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"Plus de manifestations"
Si le pays a fini par émerger de la récession en 2021, les réformes ne se sont pas traduites par de meilleurs conditions de vie pour la plupart des Angolais.
"Les gouvernements angolais parlent depuis des années de diversification économique et ils n'ont jamais réussi", estime Justin Pearce, de l'université sud-africaine de Stellenbosch.
La crise, aggravée par la pandémie de Covid-19 et une sécheresse, puis par une forte inflation, a été subie de plein fouet par la plupart des Angolais, les poussant à se tourner vers l'opposition.
Le principal parti d'opposition, l'Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola (Unita), a obtenu 43,95% des suffrages, un bond par rapport aux 26,67% remportés en 2017. Il a aussi raflé la capitale.
Son dirigeant charismatique, Adalberto Costa Junior, 60 ans, s'est rendu populaire dans les zones urbaines et au sein d'une jeunesse qui considère que le parti au pouvoir est à court d'idées.
La participation au scrutin a été faible, autour de 45%.
Mardi, un cortège de partisans du MPLA célébrant la victoire à Luanda a été stoppé par de nombreux passants en colère, une scène inimaginable il y a encore quelques années, souligne M. Santana.
"Il y aura plus de manifestations parce que cette fois les gens pensent que le MPLA ne peut rien faire de plus et qu'il devrait simplement partir et laisser la place à d'autres", estime-t-il.
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Dialogue ou oppression ?
L'opposition conteste les résultats en évoquant des divergences de comptage. Des tentatives similaires de contestation ont échoué dans le passé.
Les résultats offrent néanmoins à l'opposition une présence parlementaire accrue, lui donnant plus de poids dans la perspective d'élections locales d'ici deux ans.
"Maintenant la question c'est: Lourenço aura-t-il vraiment entendu ce que l'électorat lui dit ?", interroge Alex Vines, de l'institut de réflexion basé au Royaume-Uni, Chatham House.
"Essaiera-t-il de de faire croître l'économie, de réduire les inégalités et de trouver plus d'emplois ? Ou y aura-t-il une posture défensive avec une oppression accrue ?", poursuit-il.
Lors de son discours après la victoire, il a adopté un ton conciliant, en promettant "le dialogue et la concertation" et une attention particulière "aux attentes de la jeunesse". Il a également promis "un pays plus prospère et développé".
Mais les ressources pour y parvenir sont limitées.
L'Angola est le deuxième exportateur de pétrole d'Afrique subsaharienne mais il ne produit qu'environ 20% des produits raffinés dont il a besoin.
Et alors que la guerre en Ukraine a fait flamber les prix du pétrole, elle a aussi fait monter les prix alimentaires, annulant en partie les gains, note Justin Pearce.
Il devra aussi faire avec une opposition interne croissante, des cadres du parti ambitionnant de le remplacer à l'issue de son mandat pouvant vouloir se montrer plus critiques sur son action, relève M. Santana.