Après "l'apocalypse", les survivants du séisme en Italie craignent d'être isolés

Camp de fortune près de Pescara Del Tronto, Italie, le 25 août 2016.

Deux jours après le séisme, les répliques n'en finissent plus autour d'Amatrice. A chaque secousse, un nouveau mur s'écroule, un pont se fissure, rendant toujours plus difficile l'accès des secours aux petits bourgs isolés dans la montagne.

A l'entrée de San Lorenzo et Flaviano, tout près d'Amatrice, la petite route serpentant dans la montagne est bloquée depuis une forte réplique, de magnitude 4,8, vendredi matin. Pompiers et militaires tendent une banderole en plastique : on ne passe plus.

Les habitants regardent d'un oeil hébété les nouvelles destructions et la pelleteuse qui déblaye frénétiquement les décombres d'une maison éboulée au milieu de cette voie.

Armés de pelles et de pioches, des militaires évacuent des monticules de débris.

"Les dernières secousses ont aggravé la situation. Sur la route régionale, le pont à trois arches qui mène à Amatrice a été fermé et cette route qui assurait la liaison avec certaines maisons est bloquée. Il faut encore faire des vérifications et élargir le passage", explique Mauro Savi, géomètre de l'administration provinciale de Rieti.

Moments d'énervement, d'agacement, de tension. "Nous sommes complètement isolés", se désespère une habitante.

"Les secours sont tous à Amatrice, ils oublient les hameaux autour", déplore Marco Barba, arrivé dans la matinée de Rome pour apporter des vêtements et des provisions à ses proches. "Certains sont complètement isolés, je suis venu pour apporter de l'aide, je ne sais pas encore où je vais dormir ce soir".

Sur ces toutes petites routes de montagne, les secours piétinent souvent, stoppés dans leur élan. "Ici, c'est bloqué, ils ne nous font pas passer", se désole Felice Ciancarella, chargé de livrer des toilettes chimiques dans un camp de tentes.

Il devra attendre plusieurs heures avant de parvenir à reprendre son périple, et ce grâce à une déviation.

Au fur et à mesure de la journée, ce croisement devient un lieu de rassemblement pour les habitants du village. Les gens se rassurent, se saluent, échangent des informations.

- Sens dessus dessous -

Une jeune femme arrive en larmes et se prend le visage dans les mains devant la banderole en plastique barrant l'accès aux maisons détruites.

"Des tremblements de terre, j'en avais déjà vécu, mais là ce n'était pas un tremblement de terre, c'était une apocalypse !", raconte Anacleto Perotti, 66 ans, qui dort toujours dans sa maison restée debout.

"Mais je dors dans un fauteuil, au lit ça fait trop peur. La peur vient après le séisme, la dépression intérieure te gagne", poursuit-il. "Peur" et "mort" sont sur toutes les lèvres.

"A Amatrice, on a encore de l'espoir (...), on peut espérer retrouver des survivants (...). Ici, il n'y a plus personne", explique Fabrizio Micozzi, un trentenaire venu soutenir ses parents installés à San Lorenzo et Flaviano, hameau d'une dizaine de maisons.

"La difficulté, c'est de savoir combien manquent à l'appel parce que beaucoup se sont enfuis sans penser à appeler tout le monde", poursuit-il.

Dans leur fuite, les habitants ont dû tout abandonner derrière eux. Bruno Fascetti, un retraité résidant à Rome, ne peut plus retourner dans sa maison de campagne un peu plus loin.

Construite en 2002, aux normes antisismiques, "la structure a résisté, mais à l'intérieur tout est sens dessus dessous", raconte-t-il, inquiet. Il ne peut plus y accéder et craint les pilleurs.

"Nous avions des meubles anciens, des objets précieux. Nous aimerions récupérer nos biens. Pour l'instant, on a eu la grande chance d'avoir la vie sauve. Mais c'est une vie de travail qui est là dans cette maison", explique-t-il.

Un blindé de l'armée finit par réussir à se frayer un passage à toute allure dans les gravats pour apporter à manger à la population, soulevant un nuage de poussière, comme dans une zone de guerre.

Avec AFP