Après Orlando, le Congrès américain rejette toute restriction sur les armes

Le Capitole des Etats-Unis, siège du Congrès américain.

Le Sénat américain, à majorité républicaine, a rejeté lundi sans surprise un durcissement des lois sur les armes à feu proposé par les démocrates après la mort de 49 personnes à Orlando dans la pire fusillade de l'histoire récente des Etats-Unis.

En pleine campagne électorale, à un mois des conventions d'investiture présidentielle, il semblait improbable que les parlementaires s'accordent subitement sur l'un des sujets les plus brûlants de la politique américaine, dans l'impasse depuis des années.

Désireux toutefois de réagir après le massacre de 49 personnes, la majorité avait programmé des votes sur deux propositions de loi démocrates, ainsi que sur deux textes concurrents des républicains.

Mais chaque groupe a voté presque unanimement contre les propositions de l'autre.

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Vincent Michelot, professeur d'histoire de politique américaine à Science-Po-Lyon, joint par Nathalie Barge

"Le deuxième amendement (de la Constitution) sur le droit de détenir des armes est un droit fondamental, et toute action législative doit prendre en compte cet état de fait", a déclaré le sénateur républicain Chuck Grassley.

"Ce soir, le Sénat a tourné le dos aux victimes d'Orlando et de San Bernardino, de Newtown et de Chicago", a déploré le démocrate Dick Durbin. "Pourquoi? Parce que trop de sénateurs n'ont pas les tripes de dire non à la NRA". La National Rifle Association est le lobby des armes.

Les deux propositions démocrates visaient, d'une part, à interdire aux personnes figurant sur les listes de surveillance terroriste d'acheter des armes à feu, et d'autre part à généraliser à toutes les ventes, notamment dans les salons spécialisés, les vérifications d'antécédents criminels et psychiatriques avant toute transaction.

Considérant que s'armer est un droit constitutionnel, les républicains refusent que le FBI puisse, sur simple décision administrative, empêcher un individu d'acheter une arme. Ils ont proposé une mesure qui retarderait donc la vente de 72 heures pour les suspects terroristes, le temps qu'un juge approuve l'interdiction.

L'autre proposition républicaine consistait à réformer à la marge le système de vérifications d'antécédents.

Les démocrates ont jugé ces mesures trop modestes et ont réussi à les couler, car tout texte nécessite une majorité qualifiée de 60 voix sur 100.

Pour rebondir après ce nouvel échec, une sénatrice républicaine modérée, Susan Collins, devait dévoiler prochainement un compromis, mais ses chances de réussite paraissaient tout aussi faibles.

- Dialogue de sourds -

Les sénateurs américains avaient déjà voté sur des mesures similaires après l'attaque de San Bernardino en décembre dernier, sans succès.

Les démocrates ne se font pas d'illusions sur leurs chances d'adopter une réforme avant les élections présidentielle et législatives de novembre. Leur véritable objectif est de faire du débat sur les armes un enjeu de la campagne.

"Nous savions que desserrer l'étau de la NRA autour du Congrès serait un combat long et difficile", a réagi le démocrate Chris Murphy. "Mais notre mouvement a pris de la vitesse cette semaine".

Ce jeune sénateur du Connecticut, où se trouvait l'école de Sandy Hook, théâtre d'un massacre en 2012, s'est lancé la semaine dernière dans une obstruction symbolique et très médiatisée du Sénat pendant plus de 14 heures.

"Cette semaine, les défenseurs du bon sens sur les armes à feu ont changé le calcul politique et contraint le Sénat à voter", a déclaré lundi le président de l'association anti-armes Everytown for Gun Safey, John Feinblatt. "Le calcul est en train de changer dans le pays. Et ensemble, les Américains voteront en novembre en fonction de ce sujet".

Le candidat républicain à la Maison Blanche, Donald Trump, a pris position pour interdire aux "terroristes" d'acheter des armes mais, ayant reçu le soutien de la NRA, il cherche à éviter de froisser l'organisation.

"La NRA ne cherche qu'à défendre les intérêts de notre pays", a-t-il affirmé dimanche sur CBS.

Depuis l'attaque de la boîte de nuit gay d'Orlando, dans la nuit du 11 au 12 juin, il a déclaré qu'il regrettait qu'aucun des clients n'ait été armé. Mais il a été contredit dimanche par le dirigeant de la NRA, Wayne LaPierre. "Je ne pense pas qu'il faille des armes dans les lieux où les gens boivent", a-t-il dit.

Donald Trump a donc tenté une mise au point lundi. "Je parlais évidemment d'avoir des agents de sécurité supplémentaires", a-t-il écrit sur Twitter.

Avec AFP