Après les poignantes retrouvailles entre Coréens, l'heure des adieux

Retrouvailles des membres de familles nord-coréennes et sud-coréennes dans la station de ski nord-coréenne de Mount Kumgang, près de la zone démilitarisée (DMZ) séparant les deux Corées le 20 août 2018.

Au troisième jour de leurs émouvantes retrouvailles, des Coréens du Nord et du Sud appartenant à des familles divisées depuis la Guerre se préparaient mercredi à se dire "au revoir", cette fois probablement pour toujours.

La majorité des participants à ces réunions organisées depuis lundi dans la station nord-coréenne du Mont Kumgang ont plus de 80 ans. Et rien ne permet d'espérer dans un avenir proche la libre circulation des personnes sur la péninsule.

Mercredi matin, lors d'une ultime réunion avant les adieux, Kim Byung-Oh, 88 ans, s'est effondré en sanglots quand sa soeur, plus jeune, l'a rejoint.

"Ne pleure pas, mon frère. Ne pleure pas", lui a-t-elle dit en lui prenant la main. Mais ses larmes ont continué de couler, et sa soeur, finalement, n'a plus su retenir les siennes.

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Pendant dix minutes, le frère et la soeur se sont serré la main sans rien dire.

"Je ne pensais pas que mon père pleurerait autant", confie le fils de Byung-Oh.

Des millions de Coréens ont été séparés de membres de leur famille par le conflit de 1950-1953 qui a scellé la division hermétique de la péninsule.

Aucun traité de paix n'ayant été signé, Nord et Sud sont encore, techniquement, en état de guerre. Toute communication civile est rigoureusement proscrite et les voyages de l'autre côté de la zone démilitarisée (DMZ) sont rarissimes, et étroitement contrôlés.

"Tellement triste"

Depuis 2000, les deux camps ont organisé 20 séries de réunions de familles, au gré de l'amélioration de leurs relations bilatérales.

Mais le temps, désormais, presse. Sur les 130.000 Sud-Coréens qui s'étaient initialement portés candidats pour ces réunions, moins de 60.000 sont encore en vie.

Lors des réunions organisées cette année, les première en trois ans, le doyen, Baik Sung-kyu, avait 101 ans.

Pour les survivants qui ont la chance d'être choisis --89 familles depuis lundi, et un nombre similaire en fin de semaine-- il s'agit en trois jours de dépasser une vie de séparation.

A en croire des informations recueillies par un pool de journalistes, beaucoup ont apporté des arbres généalogiques et quantité de photos pour expliquer la situation familiale.

Lee Soo-nam, un Sud-Coréen de 77 ans, a pu revoir son frère aîné vivant au Nord. Et pour faciliter la compréhension, il a demandé à un neveu nord-coréen de lui écrire les noms de tous ses frères et soeurs, neveux et nièces.

"Je lui ai demandé les noms pour m'en rappeler, tant que je suis en vie", a-t-il dit.

"Je n'ai pas les mots pour décrire ce que je ressens maintenant", a-t-il poursuivi. "Quand pourrons-nous nous revoir? Personne ne le sait. C'est tellement triste. Si seulement nous étions plus jeunes."

"Enormément heureux"

Pour autant, il dit être "énormément heureux" d'avoir pu participer à cette réunion.

"Maintenant, je peux aller sur la tombe de mes parents et leur dire: +Père, Mère, j'ai rencontré mon frère Jong Song et je l'ai vu vivant. Je vous remercie. C'est grâce à vos prières+."

Beaucoup se disent heureux d'avoir participé à ces réunions, même si elles n'ont duré qu'une dizaine d'heures au total.

Lee Byung-joo, un Sud-Coréen de 90 ans, a pu rencontrer un neveu et une nièce, les enfants de son grand frère aujourd'hui décédé.

"En les rencontrant, c'est toute la douleur d'une vie qui s'est envolée", assure-t-il.

"J'ai des réponses à toutes les questions que je me posais. Maintenant, je peux relâcher le poids que j'avais sur le coeur. Nous avons retrouvé nos racines."

Cette série de réunions se veut une illustration supplémentaire de la remarquable détente entre le Nord et le Sud, après des années de montée des tensions en raison des programmes nucléaire et balistique de Pyongyang.

Cette rencontres avaient été décidées par le président sud-coréen Moon Jae-in et le dirigeant Kim Jong Un lors de leur sommet en avril. Il avait été suivi en juin par une rencontre historique entre ce dernier et le président amércain Donald Trump.

Avec AFP