Areva accusé par WikiLeaks de négligences en Centrafrique, le groupe nucléaire conteste

Photo d'archives (25 septembre 2013): La mine d'uranium à ciel ouvert de Tamgak à Arlit (Niger), exploitée par la Somaïr, une filiale d'Areva.

Areva a négligé la santé de ses salariés travaillant sur le gisement d'uranium de Bakouma, en Centrafrique, ainsi que la réhabilitation du site après son retrait du pays, selon un document révélé par WikiLeaks, dont le contenu est cependant contesté par le groupe nucléaire français.

"Les foreurs, aides foreurs et agents de laboratoire qui sont censés être en contact avec les roches minéralisées en uranium ne disposaient d'aucun moyen de protection ni n'étaient sensibilisés sur les mesures de radioprotection pendant leurs activités", selon ce rapport non daté d'un comité de suivi centrafricain publié vendredi par Le Monde et France Inter.

D'après ce même rapport, certains de ces employés ont déclaré que lors des forages, "ils recevaient sur leur corps des boues issues du forage, et ce, sans aucun équipement de protection adéquat contre les radiations" qu'elles contenaient.

Areva avait quitté la République centrafricaine en 2012, invoquant un climat d'insécurité à la suite de l'attaque de sa mine en juin et la morosité du marché mondial de l'uranium après la catastrophe de Fukushima, au Japon.

"Nous rappelons très clairement et très fermement que les employés du site avaient des tenues de travail adaptées, et bénéficiaient de sensibilisations régulières aux enjeux de sécurité au travail et de radioprotection", a réagi un porte-parole du groupe, interrogé par l'AFP.

"Nous rappelons et maintenons qu'Areva avait mis en place un suivi radiologique des salariés", a-t-il ajouté. Les doses moyennes reçues par les 150 salariés locaux entre 2009 et 2011 étaient "du même ordre que celles relevées dans les autres pays où nous opérons", avec une dose maximale "largement inférieure à la limite réglementaire centrafricaine et internationale".

Il n'y a jamais eu d'exploitation minière en tant que telle du gisement de Bakouma, mais des travaux d'exploration et de préparation pour une mine à ciel ouvert. Le site avait été acquis par Areva en même temps que des mines en Afrique du Sud et en Namibie à l'occasion du rachat à prix d'or par le groupe français de la société minière canadienne Uramin.

Cette opération, conclue pour 2,5 milliards de dollars (1,8 milliard d'euros à l'époque), a tourné au fiasco financier et fait actuellement l'objet d'une enquête par la justice française, qui soupçonne une escroquerie.

Le "comité chargé de suivi du processus de retrait de la société Areva Ressources Centrafrique" déplore aussi dans le rapport qu'Areva ait négligé la réhabilitation du site après son départ, évoquant notamment des fosses "remblayées partiellement" ou "abandonnées à ciel ouvert".

"Areva s'est acquittée de toutes ses obligations en la matière", a rétorqué le porte-parole du groupe. "Aujourd'hui, Areva est toujours titulaire des permis d'exploitation (...) mais n'est cependant plus +responsable+ du site de Bakouma dont il n'a plus la garde matérielle compte tenu de l'état de +force majeure+ notifié aux autorités centrafricaines au printemps 2013 et qui prévaut toujours" dans un contexte de guerre civile, a-t-il ajouté.

Le comité dénonce par ailleurs une obstruction à ses travaux par le groupe qui a, selon lui, dissimulé ou détruit des données. Areva "a procédé volontairement au formatage des disques durs de tous les ordinateurs sur le site, au verrouillage du serveur et a emporté toute la documentation existante avant l'arrivée du comité sur le site", écrit-il.

Des affirmations démenties par le spécialiste du nucléaire, dont l'activité réacteurs est en cours de rachat par EDF. "Areva a coopéré et transmis tous les éléments et informations pouvant être communiqués à ce comité", créé selon lui "unilatéralement" après la notification aux autorités de la suspension de l'exploitation du gisement en août 2012.

AFP