Attaque contre un camp militaire à Abidjan: des interrogations demeurent

La police anti-émeute dégage la route pendant une grève des transporteurs à Abobo, Abidjan, le 17 juillet 2008.

L'attaque a été menée par "un groupe d'individus venus à bord d'un véhicule type 4x4 de couleur noire et de taxis". 

Un camp militaire attaqué dans la nuit de mardi à mercredi à Abidjan par des individus non identifiés, faisant trois morts parmi les assaillants et un soldat blessé.

Un assaut mystérieux trois semaines après les attaques meurtrières contre les forces de l'ordre dans le nord de la Côte d'Ivoire.

D'abord rapportée à l'AFP par des sources sécuritaires, l'attaque qui a visé la base militaire de N'dotré, dans le nord d'Abidjan, a été confirmée mercredi midi par l'armée, dans un communiqué laconique qui ne donne aucune indication sur son origine ou ses motivations.

"Dans la nuit du 20 au 21 avril, aux environs de 01H00 (locales et GMT), des individus non identifiés ont ouvert le feu sur les postes de garde de la base militaire de N’dotré dans la commune d’Abobo, avec l’intention certaine d’y pénétrer de force. La réaction immédiate des sentinelles de faction a donné lieu à des échanges de tirs nourris, obligeant les assaillants à prendre la fuite", déclare dans ce communiqué le chef d’état-major général des armées, le général Lassina Doumbia.

"Le bilan provisoire fait état d'un blessé léger côté ami, de trois tués et un blessé fait prisonnier côté ennemi", selon le communiqué, qui précise que "des opérations militaires de ratissage ont été engagées sur le terrain et se poursuivent" et que "la situation sécuritaire reste sous contrôle".

Selon une source sécuritaire s'exprimant sous couvert d'anonymat, l'attaque a été menée par "un groupe d'individus venus à bord d'un véhicule type 4x4 de couleur noire et de taxis".

Sur les réseaux sociaux, des photos montrant les corps de trois hommes en civil morts, étendus aux pieds de soldats, circulaient mercredi.

La base militaire de N’dotré abrite notamment le deuxième bataillon projetable des forces armées de Côte d'Ivoire, qui intervient pour le compte des forces de l'ONU.

Cette mystérieuse attaque intervient trois semaines après un double assaut meurtrier contre les forces de défense et de sécurité, attribué à des jihadistes, dans le nord de la Côte d'Ivoire, frontalier du Burkina Faso, un pays ravagé par les exactions de nombreux groupes islamistes.

Double attaque

Le 29 mars, "une soixantaine de terroristes lourdement armés venant du Burkina Faso" avaient attaqué une position de l'armée à Kafolo. L'armée avait "repoussé les assaillants au terme d’une heure de combat intense", avec un "bilan provisoire" de "deux soldats tués et quatre blessés" et "trois terroristes tués et quatre interpellés", selon l'état-major.

La seconde attaque avait visé un poste de gendarmerie à Kolobougou, localité également frontalière du Burkina Faso. Un gendarme avait été tué et un autre blessé, selon l'armée.

Ces attaques n'avaient pas été revendiquées. Deux semaines plus tard, le 12 avril, un engin explosif improvisé (IED) avait explosé, sans faire de victime, au passage d'un véhicule de la gendarmerie ivoirienne dans la même zone.

En juin 2020, une précédente attaque d'envergure, attribuée aux jihadistes du Burkina, contre l'armée ivoirienne à Kafolo avait fait 14 tués parmi les soldats ivoiriens.

La première action jihadiste meurtrière sur le sol ivoirien avait été l'attentat de Grand-Bassam en 2016, qui avait 19 morts, dont de nombreux Occidentaux.

Par ailleurs en 2017, des mutineries d'anciens membres de la rébellion ivoirienne des années 2000, intégrés dans l'armée, avaient ébranlé la Côte d'Ivoire. Cette crise avait terni l'image de stabilité retrouvée du pays après la crise politico-militaire de 2010-2011, et fragilisé le président Alassane Ouattara.

Le chef de l'Etat a été réélu en octobre 2020 pour un troisième mandat controversé, lors d'un scrutin boycotté par l'opposition qui avait appelé à la "désobéissance civile". La présidentielle a donné lieu à une violente crise électorale qui a fait une centaine de morts et un demi-millier de blessés entre août et novembre 2020.

L'ancien chef de la rébellion Guillaume Soro, ex-allié devenu adversaire d'Alassane Ouattara, avait lancé un appel à la rébellion générale, non suivi d'effet. M. Soro est réputé conserver certains soutiens parmi les anciens rebelles.

La tension en Côte d'Ivoire est néanmoins retombée depuis, les élections législatives de mars s'étant déroulées dans le calme et avec la participation des principaux partis d'opposition.