Le chef de l'Etat burkinabè Michel Kafando, a décidé jeudi de maintenir son Premier ministre Isaac Zida, alors qu'une partie de l'armée réclame sa démission.
"J'ai décidé de maintenir le Premier ministre en poste", a déclaré M. Kafando dans un discours radiotélévisé solennel, le deuxième en une semaine.
M. Kafando a indiqué qu'il est "convaincu qu'à trois mois des élections, tout bouleversement à ce niveau (à la primature, ndlr) ne ferait que perturber la saine préparation des élections avec pour risques majeurs d'allonger les délais de notre engagement à organiser le scrutin à bonne date".
Le président Kafando a cependant déchu M.Zida du portefeuille de ministre de la Défense à son profit afin de "régler les questions de dysfonctionnement et surtout de frustrations au niveau de l'Armée". Le lieutenant-colonel Zida était à la fois Premier ministre et ministre de la Défense.
Le chef de l'Etat a accusé l'armée de perturber la transition.
"Je le dis tout net, il n'est pas juste que pour des intérêts divergents, notre armée nationale dont c'est la mission de protéger la paix au Burkina Faso en vienne à être le perturbateur de la paix au Burkina Faso", a-t-il martelé.
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Un léger remaniement du gouvernement est attendu en fin de semaine.
La déclaration de M. Kafando intervient après un vote des députés du parlement intérimaire qui ont voté jeudi la mise en accusation de l'ex-président Blaise Compaoré devant la Haute Cour de justice pour "haute trahison" et "attentat à la Constitution".
Le Burkina Faso est dirigé depuis novembre par des autorités intérimaires, mises en place après la chute du président Blaise Compaoré, chassé du pouvoir le 31 octobre 2014 par la rue après 27 ans de règne et actuellement réfugié en Côte d'Ivoire.
Le régime de "transition" dirigé par le président Michel Kafando et le Premier ministre Isaac Zida doit rendre les rênes du Burkina à un exécutif élu lors d'élections présidentielle et législatives dont le premier tour est prévu le 11 octobre.
Mais le pays apparaît plus fragile que jamais à trois mois de cette présidentielle. Outre les remous que pourraient susciter la mise en accusation de M. Compaoré, une grave crise autour du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), qui fut le bras armé du régime Compaoré, fait planer une ombre sur la fin de cette période de transition.
Et le pouvoir vient de subir un deuxième coup de semonce: la justice ouest-africaine a invalidé lundi dernier le nouveau code électoral qui interdisait toute participation aux scrutins d'octobre prochain à ceux qui avaient soutenu la révision constitutionnelle voulue par M. Compaoré pour rester au pouvoir, et qui a finalement provoqué un soulèvement fatal à son régime.
M. Kafando a annoncé que le Burkina respecterait la décision de la Cour de justice de la Cédéao (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest, dont il est membre).
La Cour de justice de la Cédéao a considéré que la modification du code électoral, votée en avril, constituait "une violation du droit de libre participation aux élections" et a ordonné au Burkina Faso "de lever les obstacles à une participation aux élections consécutifs à cette modification".
"C'est pour moi l'occasion, s'agissant du verdict de la Cour (...)d'affirmer que le Burkina Faso en tant que nation civilisée (...) et dans un souci d'apaisement social, se conformera au verdict de la Cour", a déclaré M. Kafando qui s'exprimait pour la première fois à ce sujet.
Le gouvernement avait, de son côté, dit "prendre acte de la décision". (Avec AFP).