Alors que Libreville cherche de nouveaux investisseurs, notamment en Chine et en France, pour relancer et diversifier son économie, les partenaires du pays suivent de près ce rendez-vous. En tête desquels la France, ex-puissance coloniale, qui avait accueilli très fraîchement la réélection de M. Bongo, mise en cause par les observateurs électoraux de l'Union européenne (UE).
Le président Bongo Ondimba avait annoncé ce "dialogue politique inclusif et sans tabou" immédiatement après la validation de sa réélection le 24 septembre par la Cour constitutionnelle. La première annonce de sa victoire avait suscité des violences rares dans ce pays pétrolier d'1,8 million d'habitants relativement prospère, dirigé par la famille Bongo depuis 50 ans.
Vendredi, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault "a exprimé l'espoir" que ce dialogue "débouche sur des réformes structurelles", après avoir reçu à Paris le Premier ministre gabonais Emmanuel Issoze Ngondet, première réception officielle d'un haut responsable gabonais depuis la présidentielle.
1.200 organisations
"La préparation des prochaines élections législatives est une opportunité pour que les différentes sensibilités politiques prennent des engagements en faveur de la démocratie et l'Etat de droit au Gabon. Une facilitation internationale pourrait utilement être mobilisée", a ajouté le quai d'Orsay.
A Paris, M. Issoze Ngondet a aussi cherché de nouveaux investisseurs auprès du patronat français (Medef), qui s'est inquiété des retards de paiement touchant les entreprises françaises au Gabon, victime de la chute des cours du brut (40% de son PIB avant la crise en 2014).
Le "dialogue politique inclusif et sans tabou" est boycotté par la Coalition pour la nouvelle République (CNR) de Jean Ping, qui se proclame toujours président élu et qui se trouvait également à Paris la semaine dernière.
M. Ping, crédité par la Cour constitutionnelle de 47,24% des voix contre 50,66% pour M. Bongo, cite le rapport de la mission électorale de l'UE qui parle d'"anomalies" mettant en cause le "résultat final de l'élection".
"Que tel ou tel ne participe pas, peu importe, cela ne gêne pas", a assuré le Premier ministre gabonais jeudi sur la chaîne France 24, se félicitant de la participation "massive" de la société civile (pas moins de 1.200 "organisations" offciellement enregistrées) et d'une cinquantaine de partis politiques.
Ce dialogue est un "impératif" pour "sortir de la situation tendue qui a prévalu au lendemain de la présidentielle", a ajouté M. Issoze Ngondet dans un entretien au quotidien Le Monde.
Un air de 'déjà-vu'
Le dialogue doit commencer par une phase "citoyenne" avec les acteurs de la société civile, alors que le gouvernement vient d'interdire les activités d'une fédération de sept syndicats d'enseignants en grève depuis plusieurs mois.
Les discussions politiques devraient ensuite porter sur plusieurs possibles réformes constitutionnelles: limitation du nombre de mandats présidentiels de sept ans, élection présidentielle à deux tours et non plus un seul, rétablissement d'un poste de vice-président...
Devrait être aussi abordé le rôle de la commission électorale et de la Cour constitutionnelle, deux institutions particulièrement décriées par l'opposition lors de la présidentielle.
Ce dialogue devrait être le préalable à des élections législatives, déjà reportées au plus au tard à fin juillet 2017. Cependant ces élections pourraient de nouveau être ajournées en cas d'adoption de réformes constitutionnelles, indique-t-on de source proche de la présidence.
Ce forum a un air de "déjà vu" pour les vétérans et les poids lourds de la classe politique gabonaise. Après sa réélection contestée lors de la première présidentielle pluraliste du pays, en 1993, Omar Bongo, père de l'actuel président, avait organisé un dialogue similaire, tenu alors à Paris.
Après des mois de tractations et de discussions de couloirs, il avait abouti à conforter le pouvoir du chef de l'Etat.
Avec AFP