Brexit: le gouvernement britannique confronté à un vote à risque au Parlement

Theresa May, première ministre britanniqye s'exprime sur la question du Brexit à la Mansion House à Londres, le 2 mai 2018 (Jonathan Brady/Pool Photo via AP).

Les députés britanniques ont entamé mardi un nouvel examen du projet de loi sur le Brexit, une séquence politique à haute risque pour la Première ministre britannique Theresa May confrontée à la menace d'une rébellion des conservateurs pro-UE.

Ce texte, intitulé "Loi (de retrait) de l'Union européenne", doit mettre fin à la suprématie du droit européen sur le droit britannique, et organiser la transposition de certaines règlementations européennes.

Les députés, qui avaient adopté une première version en janvier, doivent se prononcer sur une série d'amendements introduits lors de l'examen du texte à la Chambre des Lords, la chambre haute du Parlement britannique, allant à l'encontre du projet gouvernemental et que Mme May compte bien voir annuler.

La position du gouvernement conservateur semble particulièrement fragile sur l'un d'entre eux, qui donne au Parlement le pouvoir de renvoyer, avec des directives, le gouvernement à la table de négociations si l'accord obtenu avec Bruxelles ne lui convient pas.

Cependant, le député conservateur europhile Dominic Grieve a proposé une alternative de dernière minute, qui laisserait plus de latitude au gouvernement en offrant la possibilité au Parlement d'adopter une motion contraignante seulement en cas d'absence d'accord avec Bruxelles.

Sur l'autre sujet qui posait problème, la possibilité de maintenir le Royaume-Uni dans l'union douanière, l'exécutif semble avoir trouvé un arrangement avec sa majorité, avec un amendement de compromis porté par quatre députés tories, Oliver Letwin et Nicky Morgan pro-UE-, Jacob Rees-Mogg et Bill Cash anti-UE.

Selon Dominic Grieve, sur la BBC, la question de l'amendement sur l'union douanière serait ainsi "résolue" tandis que celle sur les prérogatives du Parlement en cas de rejet de l'accord final reste "source de difficultés".

Etant donné sa courte majorité aux Communes, et face à des récalcitrants contre la ligne qu'elle a tracée, la cheffe du gouvernement a convoqué l'ensemble des députés de son parti lundi soir pour les rappeler à l'ordre.

- "Grande trahison"-

"Le message que nous envoyons au pays cette semaine avec nos votes est important", a-t-elle prévenu. "Nous devons montrer clairement que nous sommes unis, en tant que parti, dans notre détermination à mettre en place la décision prise par le peuple britannique" qui avait voté à 52% pour sortir de l'Union européenne en juin 2016.

"J'essaie de négocier le meilleur accord possible pour le Royaume-Uni" avec Bruxelles, a-t-elle fait valoir. "Mais si les amendements des Lords sont maintenus, cela ébranlera notre position dans les négociations".

Une mise en demeure qui a conduit le secrétaire d'Etat à la Justice et député conservateur pro-UE Phillip Lee à annoncer sa démission mardi matin afin de voter librement, a-t-il expliqué.

Signe des tensions provoquées par ces votes, le tabloïd pro-Brexit The Sun a mis en garde les députés : "Vous avez le choix: Grande-Bretagne, ou grande trahison ?", a-t-il titré en une mardi. "Ignorez la volonté du peuple à vos risques et périls", a pour sa part admonesté le Daily Express.

"À ma connaissance, au moins un député sur ces bancs ne votera pas (...) selon sa conscience en raison de menaces", a dénoncé la députée conservatrice pro-EU, Anna Soubry.

A l'ouverture des débats, le ministre du Brexit David Davis a invité la chambre des Communes à prendre conscience des enjeux.

"Nous avons écouté, dans la mesure du possible, les suggestions sensées qui ont été faites pour améliorer le projet de loi mais lorsque des amendements ont été faits, volontairement ou non, pour saper (...) le résultat du référendum, nous devons les rejeter", a-t-il dit.

Malgré les divisions, le député Jacob Rees-Mogg, eurosceptique influent, a estimé que la discipline serait observée au sein des tories.

"Il y aura de l'unité. Ce ne sera pas parfait mais cela devrait suffire pour faire passer le texte et renforcer la position de Theresa May", a-t-il dit sur la radio LBC.

Car le rapport de force actuel au sein du gouvernement pourrait forcer les députés conservateurs pro-européens à modérer leurs velléités de rébellion : s'ils infligent de nouvelles défaites à Mme May, ce sont les ministres partisans d'une ligne dure sur le Brexit qui pourraient en sortir renforcés.

Avec AFP