L'une de ses avocates en France, Caroline Wassermann, a dénoncé auprès de l'AFP une "décision inique et scandaleuse", alors que "les Nations unies viennent de condamner le Cameroun pour détention arbitraire dans cette affaire".
Le pourvoi en cassation introduit auprès de la Cour suprême par Me Yen-Eyoum avait été examiné le 28 mai. Lors de l'audience, le conseilleur-rapporteur s'était prononcé pour le rejet du pourvoi.
Le 26 septembre 2014, le Tribunal criminel spécial (TCS), juridiction spécialisée dans la répression de la grande corruption, avait reconnu Lydienne Yen-Eyoum coupable du détournement de 1,077 milliard de francs CFA (1,5 million d'euro) et l'avait condamnée à 25 ans de prison.
Ecrouée depuis janvier 2008, l'avocate a toujours clamé son innocence.
Le cas de Me Yen-Eyoum avait été porté à l’attention du Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire. Timothée Donangmaye a joint dans l’Etat américain de Pennsylvanie Setondji Roland Adjovi, membre africain du groupe:
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L"arrestation" de Me Yen-Eyoum et sa "privation de liberté" sont "arbitraires", juge le groupe de travail sur la détention arbitraire du Haut Commissariat aux droits de l'Homme de l'ONU dans une décision du 27 avril consultée mardi par l'AFP et qui a déjà été transmise au Cameroun.
"Il n'y a pas notification des motifs de l'arrestation" et "la détention provisoire a dépassé les délais légaux", note cette agence des Nations unies. Le groupe de travail recommande à Yaoundé "de prendre les mesures nécessaires pour remédier au préjudice matériel et moral" subi par l'avocate, "en prévoyant une réparation intégrale".
"Je demande à être reçue par le président de la République française François Hollande pour mettre un terme à cette injustice criante", a déclaré Me Wassermann.
L'affaire rappelle celle d'un autre Français d'origine camerounaise, Michel Atangana, détenu au Cameroun depuis 1997 pour une affaire de détournement de fonds qu'il a toujours contesté et qui n'a été libéré qu'en 2014.
Me Yen-Eyoum, mandatée par le ministère camerounais des Finances, avait mené en 2004 une opération de recouvrement d'anciennes créances auprès de la SGBC, filiale de la banque française Société générale en contentieux avec l'Etat camerounais. La justice camerounaise lui a reproché d'avoir gardé une partie des fonds recouvrés.
Devant la Cour suprême, Yondo Black, l'un des avocats camerounais de la Française, avait accusé cette filiale d'être à l'origine de ses ennuis judiciaires.
Le président camerounais Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, a créé en décembre 2012 le TCS, un tribunal spécial chargé de juger des personnes suspectées d'avoir détourné des sommes au moins égales à 50 millions de FCFA (76.000 euros) dans le cadre de l'opération anticorruption "Epervier".
Lancée en 2006 sous la pression des bailleurs de fonds, l'opération "Epervier" a déjà abouti à l'arrestation de nombreuses personnalités, dont des ex-ministres et dirigeants d'entreprises publiques. Les personnes accusées ont souvent affirmé être victimes de règlements de comptes politiques à travers cette opération.