Cette annonce a été dénoncée par l'opposition et des militants des droits humains, qui ont notamment dénoncé un "déni de justice". Arrêté le 13 septembre immédiatement après avoir "légèrement blessé" le chef de l'Etat près de Moroni, Ahmed Abdou avait été, selon le Parquet, placé à l'isolement, et sa dépouille a été découverte le lendemain matin. "Lorsque les enquêteurs se sont présentés pour l'auditionner (...) ils ont trouvé le jeune (homme) allongé" et "sans vie", relate le Parquet de Moroni dans un communiqué publié dans le journal d'Etat Al-Watwan, ajoutant qu'un médecin militaire a constaté le décès et estimé l'heure de la mort à 2h du matin. "Il n'existait ni blessures par arme à feu ni par arme contondante ou tranchante. Suivant ces éléments, le Parquet estime qu’il n’y a pas d'opportunité de poursuivre l’enquête", conclut le texte, sans autre détail.
Le procureur de Moroni Ali Mohamed Djounaid avait annoncé que le corps d'Ahmed Abdou avait été immédiatement remis à la famille, ce qui excluait la possibilité d'une autopsie. Conformément au rite musulman, religion de la quasi-totalité des 870.000 habitants de cet archipel de l'Océan indien, le défunt avait été enterré quelques heures plus tard. Interrogé par l'AFP sur l'évolution d'une autre enquête, ouverte sur les circonstances et le mobile de l'attaque contre le président Azali, le procureur n'a pas répondu dans l'immédiat.
Avocat au barreau de Moroni et défenseur des droits de l'Homme, Me Gérard Youssouf a dénoncé "l'absence d'enquête impartiale": "ni les personnes ayant arrêté ce jeune, ni les services de détention (...) n'ont fait l'objet d'aucune enquête". "Il s'agit d'une forfaiture et d'un déni de justice de la part du procureur de Moroni", c'est "une injustice de sa part de clôturer une enquête qui n'a jamais eu lieu. Le ministre public a failli à ses missions", a-t-il déclaré à l'AFP. Deux partis d'opposition - Orange et Ushe - se sont également insurgés.
"Le Parquet de Moroni ne répond pas aux multiples questions" concernant "les circonstances du décès en détention" de l'agresseur présumé du chef de l'Etat, estime dans un communiqué Daoudou Abdallah Mohamed, chef d'Orange et ancien candidat à la présidentielle de janvier face à Azali Assoumani, dont il fut entre 2016 et 2021 le ministre de l'Intérieur. Dans un communiqué, Ushe, très récemment créé par des militants de la société civile, dénonce des "procédures légales et médicales (...) pas respectées" et une affaire "traitée avec beaucoup de légèreté, sans autopsie, sans enquête sérieuse", dans laquelle "le corps a été remis à la famille moins de 12 heures après son décès et inhumé aussitôt".
Ancien chef d'état-major de l'armée, Azali Assoumani a pris le pouvoir en 1999 lors d'un coup d'Etat militaire. Elu en 2002, il avait rendu le pouvoir en 2006, avant de se faire élire à nouveau en 2016, et réélire en 2019 puis en janvier dernier. Contesté, le scrutin de janvier avait été suivi de deux jours de manifestations meurtrières. Les détracteurs de M. Azali l'accusent d'autoritarisme croissant à la tête de cet archipel de trois îles du canal du Mozambique, où le président de la République cumule les casquettes de chefs de l'Etat et du gouvernement.