Les avions russes ont commencé à quitter le ciel syrien après avoir remis en selle le régime de Bachar al-Assad qui va devoir démontrer qu'il est capable de maintenir son avantage en l'absence de son parrain russe, selon des experts.
Barah Mikaïl, docteur en Sciences Politique et spécialiste du Moyen-Orient a été joint par VOA Afrique : "Cette annonce correspond à une volonté de la part du président russe de montrer aux opposants de Bachar al-Assad qu'il est de bonne volonté"
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M. Assad "est dans une bien meilleure position alors que ses ennemis sont affaiblis", souligne l'expert Aron Lund qui dirige le site Syria Crisis. "Mais cela ne veut pas dire que la guerre est finie".
En cinq mois de bombardements intensifs, Moscou a été capable de "changer l'équilibre des forces sur le terrain au profit du régime", souligne-t-il.
La force de frappe russe, composée de bombardiers Su-24, d'avions d'attaque au sol Su-25 et de chars T-90, a permis à l'armée syrienne d'engranger des victoires alors qu'elle se trouvait en mauvaise posture l'été dernier. Les Occidentaux ont accusé toutefois la Russie de privilégier des frappes sur les rebelles plutôt que sur l'organisation jihadiste Etat islamique (EI) et les autres groupes jihadistes.
Pour Thomas Pierret, spécialiste de la Syrie à l'université d'Edimbourg, les bombardiers russes "ont stoppé l'avancée des rebelles et permis au régime (...) de reprendre des positions stratégiques à Alep, Lattaquié, Damas et Deraa".
L'armée syrienne est dans une phase de reconquête, résume Aron Lund, alors que les groupes rebelles perdent du terrain surtout depuis l'offensive d'envergure lancée par le régime dans la province d'Alep en février.
L'annonce du retrait russe soulève de nombreuses questions: le régime va-t-il poursuivre cette offensive? Arrivera-t-il à maintenir ses positions autour de la province de Lattaquié, bastion de la communauté alaouite dont est issue la famille Assad?
Aider le régime à Palmyre
"L'annonce du retrait des troupes russes est surtout psychologique", estime le géographe et spécialiste de la Syrie Fabrice Balanche. "Il pourrait être interprété comme un abandon de Bachar al-Assad, mais on voit que l'opposition syrienne ne se réjouit pas. Elle attend de voir si ce retrait est effectif ou non".
La Russie devrait maintenir en Syrie 800 soldats, selon le président de la commission Défense du Conseil de la Fédération (chambre basse du Parlement), Viktor Ozerov.
En ce qui concerne les capacités militaires du régime, la Russie a préparé son retrait en livrant à son allié de "nouveaux chars capables de résister aux missiles TOW", ainsi que des des avions et des hélicoptères, affirme M. Balanche. Des ultra-modernes batteries de défense antiaérienne S-400 resteront en place.
Pour Aron Lund, le régime va également pouvoir continuer à compter sur l'aviation russe dans sa lutte contre les groupes jihadistes, notamment dans l'est du pays.
Les appareils russes l'ont montré mardi en menant des raids aériens sur les alentours de la cité antique de Palmyre, aux mains du groupe Etat islamique (EI) depuis mai 2015.
Reprendre Palmyre "sans l'aviation russe sera difficile pour les forces du régime", selon M. Pierret.
L'EI n'a pas réagi à l'annonce du président Poutine, contrairement au Front Al-Nosra, branche syrienne d'Al-Qaïda. Ces deux principaux mouvements jihadistes sont exclus de la trêve des combats en place depuis le 27 février.
"Il est clair que la Russie a subi une défaite, et dans les prochaines 48 heures, le Front al-Nosra va lancer une offensive en Syrie", a affirmé à l'AFP via Skype un commandant de ce groupe sur le terrain.
En raison des frappes russes, Al-Qaïda allié à des groupes islamistes a perdu de nombreux secteurs dans la province de Lattaquié ainsi qu'une grande partie de la province d'Alep.
Avec AFP