Soucieuses de ne pas freiner le commerce et les échanges, les autoritésse se sont pour l'instant contentées de changer la date des vacances de Pâques. Elles commenceront vendredi et dureront un mois au lieu des deux semaines prévues. Autre recommandations à la population: se tenir à distance les uns des autres, en particulier des personnes âgées plus vulnérables.
À l'heure actuelle, les cas avérés de contamination s'élèvent à 118, pour un seul décès, celui mercredi d'un homme de 41 ans qui était diabétique, selon le ministère de la Santé.
"Nous faisons ce qu'il faut (...) Et nous ne prenons rien à la légère", se défend Mauricio Rodriguez, épidémiologiste et porte-parole de la Commission chargé du coronavirus à l'Université autonome du Mexique (UNAM). "Chaque pays réagit en fonction de ses propres conditions", ajoute M. Rodriguez, qui travaille sur la stratégie du gouvernement contre le virus.
Lire aussi : Des centaines de touristes coincés en Amérique latineEn Avril 2009, l'Organisation Mondiale de la Santé avait qualifié de pandémie le virus H1N1 qui sévissait dans le pays. Le gouvernement de l'époque, dirigé par le président Felipe Calderon, avait fermé les écoles, annulé les événements publics et ordonné des campagnes d'information et de vaccination. A Mexico, les commerces, restaurants et cinémas avaient été bouclés, provoquant de lourdes pertes économiques.
Le président Andrés Manuel López Obrador a, quant à lui, choisi de faire la sourde oreille face aux critiques de l'opposition qui appelle à des mesures telles que le confinement de la population et la fermeture des frontières.
- Mesures extrêmes plus tard -
M. Rodriguez fait ainsi valoir que "des mesures extrêmes ne doivent pas être prises longtemps à l'avance car la population peut se retrouver épuisée lorsque le moment le plus critique arrive". Il assure que le système de dépistage est optimal au Mexique. Un avis que ne partage pas l'épidémiologiste Alejandro Macias, qui portait le dossier de la grippe porcine pour le gouvernement en 2009.
"Le Mexique n'a même pas réalisé 1.000 tests depuis le début de cette crise. C'est trop peu pour un pays de 120 millions d'habitants", prévient ce spécialiste qui craint que le virus ne se soit déjà largement propagé parmi des personnes qui n'ont pas eu de contact direct ou indirect avec l'étranger.
"S'il y a déjà une circulation locale [du virus], nous pourrions être à quelques semaines de l'effondrement du réseau hospitalier", met en garde M. Macias, qui se souvient qu'en 2009 les autorités avaient été beaucoup plus rapides dans les diagnostics.
Il note qu'au Mexique, "il n'y a pas plus de 4.000 lits disponibles dans les zones de soins intensifs", contre 80.000 aux États-Unis par exemple.
L'ampleur de l'épidémie est peut-être mal connue. L'Etat de Jalisco (ouest) disait mercredi être à la recherche de 400 personnes revenues de Vail (Colorado, Etats-Unis) qui pourraient être contaminées.
- Economie fragile -
De facto, l'économie mexicaine, la deuxième en Amérique latine après le Brésil, a reculé de 0,1% en 2019. Pour cette année, la perspective est "très compliquée", entrevoit Raul Feliz, du Centre mexicain de recherche économique. Il estime que le pays va devoir encaisser une diminution des arrivées de touristes et des exportations de pétrole, parmi ses principales sources de revenus.
En 2009, année de la grippe porcine, le PIB mexicain avait chuté de 5,1 %.
Le gouvernement maintient qu'il dispose de défenses "robustes" qui protègent l'économie d'une chute. M. Feliz recense ainsi la flexibilité du taux de change, les finances saines et les lignes de crédit du FMI et du Trésor américain.
Mais "un coup de semonce économique fort et une récession semblent inévitable" dans ce contexte, admet-il. La crainte d'une nouvelle baisse d'activité semble être "un facteur qui a pesé" dans la décision des autorités de ne pas prendre de mesures radicales, dit-il.