L'ancien premier ministre ivoirien Pascal Affi N'Guessan a déclaré qu'il se présentera aux prochaines élections présidentielles, prévues en octobre, sous la bannière du Front populaire ivoirien (FPI).
Premier chef de gouvernement (2000-2003) de l'ancien président Laurent Gbagbo, Affi N'Guessan dirige le FPI, fondé par son ancien mentor avec qui il entretient de longue date des relations tendues.
Conscient que le sujet est sensible pour ses troupes, il se garde toutefois de tourner la page Gbagbo trop brutalement, et plaide pour un retour de l'ancien chef de l'Etat - en interpellant le pouvoir du président Alassane Ouattara.
"Forcément, il va revenir (...) et c'est ce moment qu'il faut préparer. Il faut trouver une formule (...) créer les conditions du retour apaisé. Ceux qui sont au pouvoir doivent accepter de le recevoir", déclare M. Affi N'Guessan, dans un entretien avec l'AFP.
Après plus de sept ans de détention à la Cour pénale internationale (CPI), Laurent Gbagbo, 75 ans, a été reconnu non coupable en janvier 2019 de crimes commis entre 2010 et 2011 au cours des violences postélectorales, qui avaient fait quelque 3.000 morts en cinq mois.
En liberté conditionnelle dans l'attente d'un éventuel appel, il vient cependant de retrouver une liberté de mouvement - à condition que le pays qu'il choisira accepte de l'accueillir.
Les autorités ivoiriennes n'ont donné jusque-là aucun signal. Mais une condamnation à 20 ans de prison en Côte d'Ivoire pèse sur les épaules de l'ancien président, qui devrait théoriquement être incarcéré en cas de retour non négocié.
"S'il veut être président du parti, je suis prêt à lui céder (la place) et à jouer le rôle de vice-président. S'il est en Côte d'Ivoire et qu'il est éligible, je suis prêt à l'accompagner dans la bataille", insiste M. N'Guessan, répondant indirectement à ceux qui, dans le camp Gbagbo, mettent volontiers en doute sa loyauté.
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Mais, à 67 ans, il prévient d'emblée: Si Laurent Gbagbo "n'est pas éligible, il faut que lui aussi s'engage à soutenir ma candidature (...). C'est donnant-donnant", enjoint le député et président du Conseil régional du Moronou (sud).
Depuis le transfèrement de M. Gbagbo à la CPI en 2011, le FPI s'est scindé en deux factions.
D'un côté, les "rénovateurs" représentés par Affi N'Guessan, qui participent à la vie politique et qui ont pris le contrôle légal du parti.
De l'autre, les historiques, baptisés les "GOR" ("Gbagbo ou rien") qui ont boycotté depuis lors les scrutins en l'absence de l'ex-président, dont ils ont le soutien.
"Avec ou sans les GOR, le FPI sera présent aux élections avec un candidat et j'espère bien être celui-là", affirme M. Affi N'Guessan, qui dirige le parti depuis 2001.
Il espère organiser un congrès d'investiture en juillet. "Dans le cadre de l'unité (retrouvée) ou dans le cadre actuel, je serai candidat avec ou sans les GOR", assure-t-il, se débarrassant vite de ses précautions initiales.
Après une décennie au pouvoir d'Alassane Ouattara, l'ancien Premier ministre garde des griefs contre la Commission électorale indépendante (CEI), mais n'entend pas rééditer la politique de la chaise vide.
"Il y a des risques, des insuffisances mais c'est dans ce contexte dégradé et difficile qu'il faut se battre. La Côte d'Ivoire n'a pas besoin d'une autre crise. Il ne s'agit pas de répéter en 2020 ce qui s'est passé en 2010", fait-il valoir.
Avant le rendez-vous crucial d'octobre, deux candidats se sont déjà déclarés.
Guillaume Soro, ancien président de l'Assemblée nationale et ex-Premier ministre de M. Ouattara, s'est dévoilé le premier mais fait face à plusieurs procédures judiciaires, dont une condamnation à 20 ans de prison avec privation des droits civiques. Il vit en exil en France.
Quant au parti au pouvoir, il a désigné le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, qui se trouve en France depuis début mai pour problèmes cardiaques.
Sur place, certains Ivoiriens préfèrent tourner la page du trio Ouattara-Gbagbo-Bédié. Dans un éditorial publié la semaine dernière, le quotidien Notre Voie - proche du FPI - a appelé à la fin des "candidatures avatars", à savoir ces candidats qui ne sont que le prolongement ou la réincarnation de l'un des anciens présidents.