Dans un camp de réfugiés sahraouis, le rêve d'une terre si proche et si lointaine

Des soldats du Polisario à Bir Lahlou, dans le Sahara occidental, le 9 septembre 2016.

"Nos terres sont belles", assure rêveuse Selembouha Dadi en évoquant le Sahara occidental qu'elle n'a pourtant jamais vu, elle qui est née et a grandi dans les camps de réfugiés sahraouis de l'ouest algérien.

Ces terres, une étendue désertique de 266.000 km2 bordant la côte atlantique entre Mauritanie et Maroc, commencent pourtant à une cinquantaine de km de là à peine, de l'autre côté de la frontière algérienne et d'un "mur de défense" érigé dans les années 1980 par Rabat.

Coupant le Sahara occidental sur 2.700 km du nord au sud, ce "mur" de sable sépare la majorité du territoire sahraoui sous contrôle marocain des 20% gérés par les indépendantistes du Polisario.

"On m'a dit que c'était beau... J'ai vu des photos aussi", explique la jeune femme, dans la maisonnette en ciment du camp de Boujdour, dans la région algérienne de Tindouf (1.800 km d'Alger) où elle vit avec son père, sa mère, un de ses cinq frères de 16 ans et sa soeur de 12 ans.

Son père, Moulay, a tout abandonné il y a 42 ans, fuyant l'arrivée au "Sahara espagnol" des troupes marocaines, le Maroc et la Mauritanie se partageant alors le territoire aux termes d'un accord avec le colonisateur.

En 1979, Nouakchott a renoncé à ses revendications sur le Sahara occidental, laissant Rabat prendre le contrôle de la quasi-totalité du territoire.

Après avoir proclamé une République arabe sahraouie (RASD), le Front polisario a lui continué de combattre les troupes marocaines, jusqu'à un cessez-le-feu en 1991 sous l'égide de l'ONU.

"Nous avions des animaux (...), nous nous déplacions" dans le désert, se souvient Moulay Dadi, 72 ans, en servant le thé sous une vaste tente traditionnelle plus fraîche que la maisonnette familiale attenante et son toit en zinc.

A l'arrivée des Marocains, "nous nous sommes enfuis et nous avons tout laissé derrière nous, nos animaux, nos biens, les maisons, tout", poursuit celui qui était un jeune homme de 30 ans quand il est arrivé à Tindouf avec son épouse et ses parents, depuis décédés.

Avec AFP