En juillet, à l'exception notable des Etats-Unis, tous les pays de l'ONU avaient adopté ce Pacte à New York après de longues négociations.
Non contraignant, ce document de quelque 25 pages, premier du genre sur ce sujet, recense des principes - défense des droits de l'homme, des enfants, reconnaissance de la souveraineté nationale - et une vingtaine de propositions pour aider les pays à faire face aux migrations en facilitant l'information, l'intégration des migrants, l'échange d'expertises...
Le Pacte interdit les détentions arbitraires, n'autorisant les arrestations qu'en dernier recours.
Dès 2017, la nouvelle administration républicaine de Donald Trump avait quitté les discussions, affirmant que les dispositions du Pacte étaient contraires à sa politique migratoire et sa volonté d'en finir avec les arrivées illégales en provenance d'Amérique centrale.
- Retraits en série -
Depuis juillet, les retraits ou les reports de décision s'accumulent, jetant une sérieuse ombre sur le sommet à venir à Marrakech. "Il est crucial que la migration internationale nous unisse plutôt qu'elle nous divise", insiste pourtant le texte.
La représentante spéciale de l'ONU pour les migrations, la Canadienne Louise Arbour, a balayé mardi les critiques, mettant sur le compte de la xénophobie et de politiques intérieures les volte-face enregistrées. "Ce n'est pas un traité mais un cadre de travail" qui est proposé pour un "sujet mondial", a-t-elle asséné, en insistant sur le caractère non contraignant du texte.
A l'été, la Hongrie s'était rapidement alignée sur la position américaine et, à l'approche du sommet au Maroc, plusieurs autres pays viennent aussi de renoncer ou de geler leur décision: parmi eux, l'Australie, la République tchèque, Israël, la Pologne, l'Autriche, la Bulgarie, la Slovaquie, la Belgique...
Et même la Suisse confrontée à une opposition parlementaire. Un comble alors que le Pacte a été négocié pendant 18 mois sous la houlette de ce pays et du Mexique, co-facilitateurs pour le consensus mondial acquis en juillet.
- Résolution -
Selon eux, les 27 pays de l'Union européenne avaient parlé tout au long des négociations "d'une seule voix".
Certains d'entre eux avancent aujourd'hui des craintes de voir déferler des migrants. Le texte est "dangereux", il "incitera des millions de personnes à prendre la route", a ainsi dit Budapest. Il ne "garantit pas la sécurité de la Pologne", a renchéri Varsovie.
Tous ces arguments "ne sont pas très précis", rétorque Louise Arbour, en laissant poindre son incompréhension alors que le texte "protège la souveraineté" des Etats.
"Espérons que ces pays rejoignent à l'avenir le Pacte". "Cela peut vouloir dire qu'ils prennent la question au sérieux", veut croire la présidente de l'Assemblée générale de l'ONU, l'Equatorienne Maria Fernanda Espinosa.
"L'Histoire de l'humanité est l'Histoire de peuples en mouvement", rappelle-t-elle.
"Les migrants sont un moteur extraordinaire de croissance" et ce "Pacte mondial pour une migration sûre, ordonnée et régulée (...) est un pas sans précédent pour accroître la coopération internationale", avait estimé en juillet le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. Selon lui, 60.000 migrants sont décédés depuis 2000 en mer, dans le désert ou ailleurs.
"Le Pacte mondial n'imposera rien à personne, mais il propose des solutions", avait alors résumé le co-facilitateur mexicain, l'ambassadeur Juan José Gomez Camacho.
Le nombre de migrants dans le monde est estimé à 258 millions, soit 3,4% de la population mondiale.
Plusieurs ONG, comme Amnesty International ou la Fédération internationale de la Croix-Rouge, avaient salué l'adoption du texte, tout en réclamant la "levée des barrières qui interdisent à des migrants vulnérables d'accéder à l'aide humanitaire et aux services de base".
Après le sommet de Marrakech, où le texte doit être formellement entériné sans signature, une résolution est prévue à l'Assemblée générale. Avec une dernière approbation sans vote et par consensus, espère-t-on encore à l'ONU. Pour la suite, un réseau de coordination sur les migrations pourrait être établi au sein de l'ONU, selon Louise Arbour.