Benjamin Netanyahu et son rival Benny Gantz tentaient de grappiller d'ultimes voix lundi soir à quelques heures de la fin des troisièmes législatives en moins d'un an devant déterminer de l'avenir politique du Premier ministre, le plus pérenne de l'histoire d'Israël mais désormais inculpé pour corruption.
Et à l'heure du nouveau coronavirus, avec deux nouveaux cas confirmés lundi soir, ce vote a donné parfois lieu à des scènes de science-fiction dans des bureaux où du personnel électoral en combinaison de protection accueille des Israéliens entrés en contact avec des personnes contaminées ou ayant voyagé dans des pays touchés par l'épidémie.
Après avoir voté à Jérusalem, M. Netanyahu a appelé ses partisans à voter pour assurer la "victoire", affirmant que "cette affaire de coronavirus est totalement sous contrôle".
Dans le camp adverse, M. Gantz, son principal rival, a dit "espérer qu'aujourd'hui marquera le début d'un processus de guérison (...) Aujourd'hui, nous allons changer de disque, mettre fin aux dérapages, aux mensonges et à la manipulation."
Après des élections en avril et septembre 2019 n'ayant pas réussi à départager le Likoud (droite) de M. Netanyahu, 70 ans, et la formation centriste Kahol Lavan ("Bleu-blanc") de M. Gantz, 60 ans, les Israéliens sont appelés lundi à boucler ce long triathlon politique.
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En journée, ces derniers ont répondu présents. Selon la commission électorale, le taux de participation à 18H00 (16H00 GMT) était de 56,3%, soit près de trois points de plus qu'à la même heure lors des élections de septembre dernier.
Et avant la fermeture des bureaux de vote, à 22H00 (20H00 GMT), les deux camps multiplient les messages sur les réseaux sociaux pour encourager les électeurs à se précipiter aux urnes dans cette première élection de l'histoire d'Israël où un chef de gouvernement mène une campagne malgré une inculpation contre lui.
Inculpé en novembre pour corruption, malversations et abus de confiance dans une série d'affaires, Benjamin Netanyahu joue son avenir politique dans ce scrutin qui intervient de surcroît à deux semaines du début de son procès.
- "Il reste innocent" -
Ces démêlés avec la justice n'ont pas empêché Ella Levy, 63 ans, de voter pour "Bibi Netanyahu". Il "nous a menés où nous sommes aujourd'hui, politiquement, économiquement et je veux que cela continue. Et puis, il reste innocent jusqu'à preuve du contraire."
Etudiante en mathématiques, Inbal a elle donné sa voix à Benny Gantz pour empêcher M. Netanyahu de rester au pouvoir. "Gantz ne m'impressionne pas mais il n'y a pas d'autres options."
Les derniers sondages plaçaient le Likoud et le parti "Bleu-blanc" dans un mouchoir de poche, incapables d'obtenir une majorité de sièges au Parlement sans l'appui d'autres partis.
M. Netanyahu, au pouvoir pendant 14 ans dont la dernière décennie sans interruption, compte sur le soutien des formations ultra-orthodoxes du Shass, du Judaïsme unifié de la Torah ainsi que de la liste Yamina (droite radicale).
"Bleu-Blanc" mise sur le soutien des partis de gauche, réunis au sein d'une liste unique, et pourrait bénéficier d'un appui de la "Liste unie" des partis arabes israéliens qui avaient provoqué la surprise en septembre en gravissant la troisième marche du podium avec 13 sièges.
"Nous espérons cette fois en obtenir 16", dit le chef de la "Liste unie", Ayman Odeh, dont l'objectif est de barrer la route à M. Netanyahu, "parrain" selon lui du plan du président américain Donald Trump pour un règlement du conflit israélo-palestinien.
- Une campagne "sale" -
M. Netanyahu a mené sa campagne sur le socle du projet Trump, en promettant l'annexion rapide de la vallée du Jourdain et de colonies israéliennes en Cisjordanie, territoire palestinien occupé depuis 1967 par Israël, comme prévu par le plan.
Benny Gantz soutient lui aussi le projet américain, mais a davantage fait campagne sur les problèmes judiciaires de son rival.
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La campagne électorale a été marquée par des scandales, des mots parfois durs, voire des conversations personnelles de responsables politiques enregistrées à leur insu puis diffusées dans les médias.
"Nous ne méritons pas une autre campagne sale et lamentable comme celle qui s'est achevée aujourd'hui et nous ne méritons pas cette instabilité sans fin", a déclaré le président Reuven Rivlin, qui a dit ressentir une "honte profonde".
Des partis redoutent, eux, que la propagation de "fausses nouvelles" sur l'épidémie mondiale de coronavirus pousse des électeurs à éviter les bureaux de vote par crainte de contamination en Israël, qui recense désormais 12 cas confirmés pour une population d'environ neuf millions d'habitants.
Pour rassurer la population, les autorités ont désigné des bureaux de vote réservés uniquement aux 5.600 Israéliens entrés en contact avec des personnes contaminées ou ayant voyagé dans des pays touchés par l'épidémie.
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