L'ONG y détaille le rôle des soldats érythréens ainsi que des combattants rebelles de la région éthiopienne du Tigré dans ces exactions à grande échelle, également marquées par des rapatriements forcés et d'importantes destructions dans deux camps de réfugiés.
"Les meurtres horribles, les viols et les pillages contre les réfugiés érythréens au Tigré sont clairement des crimes de guerre", affirme la directrice de HRW pour la Corne de l'Afrique, Laetitia Bader.
"Durant de nombreuses années, le Tigré a été un refuge pour les réfugiés érythréens fuyant les persécutions (dans leur pays)", rappelle-t-elle: "Mais aujourd'hui, ils ne s'y sentent plus en sécurité".
Le nord de l'Ethiopie est ravagé par de violents combats depuis novembre, lorsque le Premier ministre Abiy Ahmed a envoyé l'armée au Tigré pour destituer les autorités régionales issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), qu'il accuse d'avoir orchestré des attaques contre des camps militaires.
Le régime érythréen -ennemi juré du TPLF, qui dirigeait l'Ethiopie lors du sanglant conflit frontalier entre les deux pays de 1998 à 2000- a soutenu militairement Addis Abeba en envoyant des troupes dans cette région qui borde sa frontière sud.
Avant le début du conflit, 92.000 réfugiés érythréens se trouvaient au Tigré, dont 19.200 dans les camps de Hitsats et de Shimelba, selon l'Agence éthiopienne pour les réfugiés et les rapatriés (ARRA).
- Réfugiés disparus -
Les forces érythréennes et tigréennes se sont affrontées pour la première fois près de Hitsats environ deux semaines après le début de la guerre.
HRW affirme avoir reçu des "informations crédibles" selon lesquelles les troupes érythréennes ont tué 31 personnes dans la ville de Hitsats. Mais le véritable bilan est "probablement beaucoup plus élevé", ajoute l'ONG.
L'AFP a par ailleurs pu établir comment, une fois que les combats ont atteint le camp de Hitsats, des miliciens pro-TPLF ont ciblé des réfugiés dans le cadre de représailles, tuant neuf jeunes Erythréens devant une église.
Lorsque les Érythréens ont pris le contrôle du camp, ils auraient transporté 17 réfugiés blessés en Érythrée pour y être soignés, selon le rapport de HRW.
Lire aussi : Tigré: les réfugiés érythréens vont bientôt manquer de nourritureMais la plupart de ces réfugiés sont toujours portés disparus, de même que 20 à 30 autres qui ont été détenus "dont des membres du comité des réfugiés et des membres présumés de l'opposition, dont deux femmes", affirme l'organisation.
Après avoir repris le contrôle de la zone début décembre, les forces tigréennes ont commencé à voler, emprisonner, violer et attaquer les réfugiés avec des armes, dont une grenade, faisant potentiellement des dizaines de morts, affirme-t-elle.
Les forces érythréennes sont revenues le mois suivant et ont forcé ceux qui restaient dans les camps à partir. Des images satellites indiquent que le camp a été en grande partie détruit peu de temps après, selon HRW.
- "Rapatriements forcés" -
Des milliers de réfugiés qui se trouvaient à Hitsats et Shimelba manquent toujours à l'appel.
Des centaines d'entre eux n'avaient d'autre choix que de retourner en Erythrée dans ce que HRW qualifie de "rapatriements forcés".
Certains sont allés dans les camps de Mai Aini et Adi Harush, plus au sud. Mais ceux-ci sont passés ensuite sous contrôle du TPLF en juillet.
L'ARRA a accusé le TPLF d'avoir déployé de l'artillerie lourde à Mai Aini et Adi Harush, de piller des véhicules et des entrepôts d'aide et d'empêcher les réfugiés de partir, ce qui équivaut à "une prise d'otages".
Le TPLF a rejeté ces affirmations, en s'engageant à assurer la protection des réfugiés.
Les autorités éthiopiennes tentent d'accélérer la réinstallation de réfugiés du sud du Tigré vers un site de 90 hectares dans la région de l'Amhara, voisine du Tigré. Mais la région a été gagnée par les combats en juillet.
HRW demande à toutes les parties au conflit d'accorder aux réfugiés la liberté de mouvement et un accès sans entrave à l'aide.