Des sociétés secrètes se révoltent contre l'interdiction de leurs rites initiatiques en Sierra Leone

Une localité de la périphérie de Kenema, où la secte Poro est très présente, en Sierra Leone.

Des membres d'une société secrète se sont rebellés dans le sud-est de la Sierra Leone contre l'interdiction par les autorités de leurs rites d'initiation, attaquant un village et libérant des détenus.

L'interdiction a été signifiée à l'ensemble des chefs coutumiers et autorités du pays dans une directive, au motif que les activités de ces sociétés secrètes seraient détournées "par certains individus pour régler leurs comptes avec leurs adversaires politiques".

Très influentes dans plusieurs pays d'Afrique de l'Ouest, les sociétés secrètes sont connues notamment pour leurs rites d'initiation des jeunes garçons et des jeunes filles, impliquant souvent des cérémonies de scarifications, de circoncision et d'excision.

Le jour de la publication de la directive gouvernementale, qui donnait 24 heures aux membres des sociétés secrètes pour achever les rituels déjà entamés, deux personnes ont été tuées dans des heurts entre la police et membres de la société Poro dans la région de Kenema (sud-est).

Et le lendemain, ils ont enlevé une dizaine d'ouvriers se rendant sur leur lieu de travail, selon les autorités.

"Des hommes de Poro se sont déchaînés mercredi, quelques heures après l'entrée en vigueur de l'interdiction", a déclaré jeudi un porte-parole de la police, Brima Kamara.

"Ils s'en sont pris à de paisibles habitants du village de Liema en chantant des hymnes du Poro, les forçant à se cacher" pendant des heures, ont libéré les détenus d'un commissariat de police et pillé des maisons, a ajouté M. Kamara.

Le calme était revenu jeudi sur place, mais les femmes et les habitants non membres de cette société secrète restaient terrés chez eux, a-t-il précisé.

"Nous allons poursuivre les initiations de nos sociétés secrètes parce qu'elles font partie de notre tradition", a déclaré un membre du Poro ayant requis l'anonymat.

"Nous ne sommes pas contre une interdiction temporaire mais nos rites initiatiques doivent être achevés", a-t-il poursuivi.

Les activités des sociétés secrètes et les rituels ont déjà été suspendues en Sierra Leone, notamment pour les élections de 2012 et 2018 ou au paroxysme de l'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest en 2014.