En novembre 2018, plus de 78% des personnes en prison étaient en attente de jugement dans les trois prisons cibles notamment Abéché, Moundou et N’Djamena. Une situation qui viole les textes en vigueur.
"Le code de procédure pénale dit que si une personne est poursuivie pour simple infraction, cette personne doit être jugée dans un délai de 6 mois maximum. Pour des crimes c’est un an renouvelable", a déclaré Maitre Nodjitoloum Salomon, président de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture, section du Tchad. Deux ans après l’exécution de ce projet, il estime que la situation a nettement évolué sauf qu’il reste beaucoup à faire à N’Djamena.
Lire aussi : Les magistrats tchadiens en grève pour exiger plus de sécuritéAvec chiffres à l’appui, il confirme que "le nombre des gens qui attendent d’être jugés a baissé. A Abéché, 5%, à Moundou, c’est presque 0% mais le gros problème c’est ici à N’Djamena", a-t-il dit.
Le problème est aussi structurel: la capitale tchadienne n'a que 7 juges d’instruction pour 2 millions d'habitants. C’est ce qui fait qu’il y a une certaine lenteur dans le traitement des dossiers.
La maison d’arrêt de N’Djamena ne répond pas aux normes internationales mais accueille plus de 1.900 détenus dont une quarantaine de femmes et une vingtaine de mineurs.
Le 6e substitut du procureur de la République de grande instance de N’Djamena Abdéramane Ahmat Atim, évoque plusieurs facteurs pour justifier le nombre pléthorique de la population carcérale
Pour lui, pendant cette période du Covid-19, le ministre de la Justice Djimet Arabi a suspendu des audiences ordinaires "pour éviter la contamination de la maladie et donc seul le parquet fonctionne pour éviter la recrudescence de la violence".
Il y a d’autres facteurs qui sont également entrés en jeu notamment "les avocats qui font le dilatoire en demandant le report des audiences donc la responsabilité est partagée", a-t-il précisé.
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Le procureur de la République de Moundou, au Sud du Tchad, Brahim Ali Kolla évoque quant à lui le manque de fourgonnette pour extraire les détenus pour les amener à l’audience puisque la maison d’arrêt est située à 17 km de la ville et le dysfonctionnement au niveau de la chambre d’accusation.
"Le vrai problème", dit-il, "c’est au niveau de la cour d’Appel, la chambre d’accusation qui doit en réalité procéder éventuellement à la mise en accusation de ses personnes qui attendent et aussi la chambre criminelle qui est prise en compte dans le nouveau code de procédure pénale dans les toutes les cours d’appels qui traînent".
"C’est ce qui fait qu’on a plus de gens qui attendent la session de cette chambre criminelle pour être situés sur leur sort", a souligné Brahim Ali Kolla.
Le procureur de la République d’Abéché, Hassa Djamouss Hachim, a déclaré à VOA Afrique que les détenus de la maison d’arrêt d’Abéché dans la province du Ouaddaï (est) "sont en insécurité puisque les agents de sécurité détachés pour assurer leur sécurité sont en sous effectifs".
Contacté plusieurs fois pour avoir la version du gouvernement, le ministre de la Justice, Djimet Arabi, n’a pu répondre.