Donald Trump a loué lundi à Manille la qualité de ses relations avec Rodrigo Duterte, dirigeant controversé en raison de la guerre sanglante qu'il a déclenchée contre le trafic de stupéfiants.
Assis côte à côte, le président américain et son homologue philippin, âgés respectivement de 71 et 72 ans, sont apparus très décontractés, plaisantant au début de leur premier tête-à-tête.
Mais ils ont aussi été avares de déclarations devant les journalistes, ignorant en particulier les questions sur les droits de l'homme.
La "guerre contre la drogue" menée avec des méthodes expéditives par le président philippin vaut à Manille un feu nourri de critiques sur la scène internationale.
"Nous avons de très bonnes relations", a souligné M. Trump avant de louer la qualité de l'organisation du sommet des nations de l'Asie du Sud-Est et de livrer ses impressions sur la météo. "Aux Philippines, le temps finit toujours par tourner au beau...".
Sollicité sur la question des droits de l'homme, M. Trump, qui achève aux Philippines une tournée marathon qui l'a menée dans cinq pays d'Asie, est resté muet.
"Ce n'est pas une conférence de presse, c'est une rencontre bilatérale", a coupé court M. Duterte, assis à ses côtés sans cravate, avant que les journalistes ne quittent la pièce.
Peu après la rencontre, Harry Roque, porte-parole de l'homme fort de Manille, a assuré que "la question des droits de l'homme n'avait pas été soulevée" au cours de cet entretien de 40 minutes.
"Le président Trump a spécifiquement souligné qu'il avait toujours été un ami de l'administration Duterte contrairement à son prédécesseur", a-t-il poursuivi, soulignant que la question des échanges commerciaux entre les deux pays avait occupé une large place.
De son côté, Sarah Sanders, porte-parole de l'exécutif américain, a assuré que le sujet des droits de l'homme avait été "brièvement" évoqué.
Les relations entre Manille et Washington, deux alliés tenus par un accord de défense, ont connu de fortes turbulences après l'arrivée au pouvoir en 2016 du populiste avocat philippin.
Il y a un an, lors du sommet de l'Asean qui avait lieu au Laos, Barack Obama avait annulé son tête-à-tête après avoir été traité de "fils de pute" par l'homme fort de Manille.
Avec AFP
- Etranges poignées de mains -
Si le président philippin revendique haut et fort un style très provocateur, son entourage suggère régulièrement de ne pas le prendre au pied de la lettre, soulignant qu'il aime plaisanter et que c'est un adepte de "l'hyperbole".
Pour les Philippines, comme pour d'autres pays accusés de violation des droits fondamentaux, l'administration Trump assure de son côté qu'elle ne reste pas inactive mais qu'elle préfère la discrétion aux dénonciations publiques.
"A quoi cela sert-il de s'époumoner sur ces sujets? Cela n'a pas été très efficace dans l'histoire récente", avait expliqué H.R. McMaster, conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, avant son départ en Asie.
Elu sur la promesse d'éradiquer le trafic de drogue, M. Duterte a lancé une campagne dénoncée avec force par les organisations de défense des droits de l'Homme qui l'accusent d'orchestrer des meurtres extrajudiciaires en masse, perpétrés par des policiers corrompus et des miliciens.
Depuis son arrivée au pouvoir voici 16 mois, la police a annoncé avoir abattu 3.967 personnes. Des inconnus ont tué 2.290 suspects dans des affaires de drogue. Des milliers d'autres personnes ont été abattues dans des circonstances non élucidées, selon les chiffres de la police.
Quelques heures avant le tête-à-tête très attendu, la traditionnelle photo de famille du sommet de l'ASEAN avait donné lieu à une joyeuse pagaille.
Placé au centre, M. Trump devait croiser les bras et serrer la main des deux dirigeants debout à ses côtés. Mais il a serré des deux mains celle de son voisin de droite, le Premier ministre du Vietnam Nguyen Xuan Phuc, laissant celle de M. Duterte, sur sa gauche, dans le vide. Après quelques secondes, il a fini par rectifier le tir.
En marge du sommet, les forces de police anti-émeutes ont utilisé des canons à eaux pour disperser un rassemblement anti-Trump à Manille.
"Trump rentre chez toi", pouvait-on lire sur les pancartes brandies par les manifestants, au nombre de 2.000 selon la police.