Egypte : la tenue vestimentaire d’une victime de harcèlement sexuel fait polémique

Harcèlement sexuel: de plus en plus de cas dans le monde arabe

Une chaîne de télévision égyptienne a suspendu le programme d'une animatrice controversée qui a déclenché la colère sur les réseaux sociaux et dans les médias, en mettant en cause la tenue vestimentaire d'une invitée victime de harcèlement sexuel.

Les cas d'agression et de harcèlement sexuels --propos ou gestes obscènes, attouchements-- sont légion en Egypte. Selon une étude de l'ONU parue en 2013, 99% des femmes affirment en avoir été victimes, qu'elles soient vêtues "à l'occidentale" ou voilées.

La chaîne de télévision privée Al-Nahar a annoncé dans un communiqué la suspension du programme de l'animatrice Riham Saïd et l'ouverture d'une enquête, assurant "respecter toutes les femmes et les filles".

Car depuis plusieurs jours, l'affaire fait parler dans les médias égyptiens. Mardi, Mme Saïd recevait l'étudiante. L'épisode commence par les images d'une caméra de surveillance, dans un centre commercial du Caire, montrant une altercation entre la jeune femme et un homme passant à ses côtés, qui finit par la gifler à deux reprises avant l'intervention des agents de sécurité.

La jeune femme a expliqué ensuite à l'animatrice que l'inconnu la draguait et l'a giflée quand elle a menacé d'appeler les services de sécurité.

Une fois l'entretien terminé, l'animatrice se lance dans un long monologue moralisateur, diffusant des photos de la jeune fille "qui lui ont été envoyées", montrant l'étudiante dans une voiture avec une bouteille d'alcool, ou encore en maillot de bain sur la plage, portée par un homme.

"Si j'accepte d'être porté sur les bras en maillot de la sorte, je vais certainement accepter qu'on me drague", fustige Mme Saïd.

"Il faut demander des comptes aux filles dont le comportement encourage les garçons (...), qui leurs sourient, les regardent, leur parlent, et qui portent des vêtements osés", assène Mme Saïd.

La jeune femme a plus tard accusé l'émission d'avoir récupéré des photos de son téléphone portable durant son entretien, ce que l'animatrice a démenti.

Sur les réseaux sociaux, les utilisateurs ont exprimé leur indignation avec plusieurs hashtag en arabe --notamment "boycottez Riham Saïd"--, appelant à boycotter les entreprises qui financent l'émission.

Face à la colère, 17 entreprises sponsors de l'émission ont alors annoncé jeudi la suspension de leurs publicités.

Mercredi, l'étudiante en larme se défendait sur le plateau d'une autre chaîne de télévision privée.

"J'aurais dû me faire gifler" et me taire, regrettait-elle. "Je pensais qu'elle allait m'aider. Elle a détruit ma vie".

Avec AFP