RDC

Début de la course à la présidentielle en RDC

Le président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni), Corneille Nangaa, dans son bureau à Kinshasa, le 4 avril 2018.

La campagne pour les élections du 23 décembre en République démocratique du Congo a vraiment commencé mercredi avec des appels à la mesure du président de la commission électorale et les promesses "d'alternance" du candidat de l'opposition Martin Fayulu.

"Que le meilleur gagne!", a lancé le président de la commission électorale nationale indépendante (Céni), Corneille Nangaa, en rappelant que la campagne commençait officiellement jeudi 22 novembre à minuit selon le calendrier électoral.

M. Nangaa a souhaité que "la campagne ne soit pas un moment de violences" et appelé les 21 candidats à la "courtoisie" et au "débat d'idées", devant des membres de la majorité et de l'opposition au Parlement.

Les élections du 23 décembre doivent désigner le successeur du président Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001.

De retour d'Europe par vol régulier peu avant 13 heures (12 heures GMT), l'opposant Martin Fayulu a été salué à l'aéroport de Ndjili par plusieurs centaines de supporteurs, mercredi, jour de ses 62 ans.

"Le candidat commun est là. Je suis là", a-t-il déclaré à la presse.

​L'outsider issu d'un petit parti a été désigné "candidat commun" de l'opposition lors d'une réunion de sept opposants congolais le 11 novembre à Genève, dont Moïse Katumbi et Jean-Pierre Bemba.

Le jour suivant, deux d'entre eux, Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe, sont revenus sur leur engagement de se désister en sa faveur à l'élection présidentielle.

M. Fayulu s'est engagé à "arracher l'alternance démocratique" par "des élections crédibles, c'est-à-dire avec des bulletins de vote en papier, et sans la machine à voter".

M. Fayulu et ses supporteurs refusent cet écran tactile qui permet de choisir les candidats et d'imprimer les bulletins de vote.

L'UDPS de M. Tshisekedi veut des élections, "avec ou sans machine à voter". "Félix Tshisekedi a vendu le pays. Le traître a accepté la machine à voter", ont chanté les supporteurs de M. Fayulu.

M. Tshisekedi doit revenir dans les prochains jours à Kinshasa.

Transition de pouvoir

L'enjeu est historique: permettre une première transmission du pouvoir sans effusion de sang depuis l'indépendance en 1960 de ce pays-continent (2,3 millions de km2, neuf frontières, 80 millions d'habitants, d'immenses richesses minérales).

Vingt-et-un candidat briguent la succession du président Joseph Kabila, 47 ans dont 18 ans au pouvoir depuis l'assassinat de son père et prédécesseur Laurent-Désiré en janvier 2001.

Sous la pression internationale - et de la rue congolaise, assure l'opposition -, le chef de l'Etat sortant a renoncé à briguer un troisième mandat interdit par la Constitution, au plus grand regret d'une partie de ses supporteurs.

Avec sa coalition Front commun pour le Congo (FCC), M. Kabila a désigné un "dauphin", son ex-ministre de l'Intérieur Emmanuel Ramazani Shadary, qui vient de promettre 86 milliards de dollars sur cinq ans pour le développement de la RDC, pays pauvre malgré ses richesses.

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Machines à voter

Plus de 40 millions d'électeurs ont été enregistrés par la commission électorale, qui a acheté quelque 106.000 "machines à voter" à une société sud-coréenne pour les trois scrutins.

La "machine à voter" est rejetée en préalable aux élections par le candidat de l'opposition Martin Fayulu, soutenu par l'ex-gouverneur du Katanga en exil Moïse Katumbi et l'ex-chef de guerre Jean-Pierre Bemba.

"Nous n'allons pas boycotter les élections. Nous allons demander les bulletins de vote", a déclaré mardi soir sur TV5Monde M. Katumbi, qui passe pour le grand argentier de l'opposition.

Le premier lot des machines à voter, Kinshasa, 9 janvier 2018. (Twitter/Ceni-RDC)

"Un de ces quatre matins, c'est peut-être Kabila qui risque d'annuler les élections et de faire un report. Nous n'allons pas accepter. Il n'y aura plus de négociations parce que trop c'est trop", a prévenu M. Katumbi, empêché de rentrer en RDC pour se présenter lui-même.

Pour la première fois mardi, un des 21 candidats, Seth Kikuni, a officiellement demandé à la commission électorale le "report immédiat" des élections prévues le 23 décembre, pour éviter des risques de "chaos".

La Céni reste imperturbable et répète que les élections auront lieu en temps et en heure, avec les "machines à voter" - de fait un écran tactile pour choisir les candidats et imprimer les bulletins de vote.

"Nous sommes dans le brouillard", résume un observateur étranger très averti, sur la tenue effective des élections au 23 décembre.

Les "partenaires" étrangers de la RDC sont tenus à l'écart du processus électoral par Kinshasa, qui a refusé toute aide financière ou logistique, même de la Mission des Nations unies au Congo (Monusco), la plus importante au monde.

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Outre les polémiques sur la "machine", des violences menacent la tenue du scrutin en de nombreux endroits du pays, à commencer par Beni (Nord Kivu, dans l'est), sous la double emprise des tueries attribuées au groupe armé ADF et d'une épidémie de fièvre hémorragique Ebola.

L'opposition congolaise aborde la campagne en ordre dispersé, après un très éphémère accord à Genève à sept sur la "candidature commune" de M. Fayulu.

Dès le lendemain, M. Fayulu a perdu le soutien du parti historique de l'opposition UDPS et de son candidat Félix Tshisekedi, qui affirme vouloir se présenter aux élections, avec ou sans la "machine à voter".

M. Tshisekedi doit rentrer samedi à Kinshasa, après avoir cherché des fonds en Europe avec son allié Vital Kamerhe, l'ex-président de l'Assemblée nationale. Les deux hommes pourraient annoncer un "ticket" dans les prochains jours.

Face aux divisions de l'opposition, le camp du président Joseph Kabila se présente en ordre de bataille autour du "dauphin", Emmanuel Ramazani Shadary, bientôt 58 ans.

Originaire de l'est comme bien des cadres du pouvoir en pla. Ramazani Shadary est une des quinze personnalités congolaises sous sanction de l'Union européenne (UE) pour atteinte aux droits de l'homme quand il était ministre de l'Intérieur entre décembre 2016 et début 2018.

A cette date, les élections prévues fin 2016 à l'expiration du second mandat de M. Kabila avait été reportées à fin 2017, puis de nouveau au 23 décembre prochain.

Ces sanctions devraient être renouvelées par Bruxelles d'ici la fin de l'année, en pleine campagne.