Les difficultés de la BIAC témoignent de la situation économique délicate que traverse la RDC du fait de la chute des cours des matières premières, et elles risquent de nuire aux efforts du gouvernement pour favoriser l'accès bancaire dans un pays ou moins de 5% de la population dispose d'un compte en banque.
"Avec le nombre de clients, l'affluence et les rumeurs (sur la faillite de la banque) on ne peut servir l'intégralité des demandes, on a limité temporairement les retraits à 500 dollars" par jour, a déclaré la nouvelle directrice générale par intérim de la BIAC, Anne Mbuguje lors d'une conférence de presse.
Mme Mbuguje a pris les commandes de cet établissement bancaire familial jeudi après un changement de direction à la tête du groupe. Elle a précisé que pour les entreprises, des exceptions pouvaient être faites afin de permettre des retraits plus importants.
Les difficultés de trésorerie de la BIAC sont apparues publiquement en début de semaine et nombre de petits épargnants se sont rués vers les guichets de la banque ces derniers jours pour retirer leur argent.
La banque explique ses soucis par le retrait d'une ligne de refinancement mensuel jusqu'à concurrence de quelque 42 millions de dollars américains auprès de la Banque centrale du Congo (BCC). Selon Mme Mbuguje, la BCC a décidé de couper le robinet des liquidités "sur décision du gouvernement".
La BIAC n'est "pas en faillite", a assuré Mme Mbuguje, qualifiant la crise de "passagère".
Lundi, le cabinet du Premier ministre Matata Ponyo avait indiqué que le gouvernement était "d'avis que des dispositions adéquates doivent être prises pour préserver la viabilité de [la BIAC], mais aussi et surtout sécuriser l'épargne publique".
Depuis la suppression de sa ligne de refinancement auprès de la BCC, la BIAC peine à trouver des liquidités sur le marché interbancaire.
Selon plusieurs sources bancaires, l'approvisionnement en dollars (l'économie est dollarisée à près de 85%) est très difficile depuis quelques semaines à Kinshasa, et les banques rechignent à se prêter entre elles comme elles le font d'habitude, parfois simplement faute d'avoir les liquidités pour le faire.
Selon une source interne à la BIAC, le bilan de la banque est par ailleurs "plombé" par des créances d'un montant de 25 millions de dollars sur l'État congolais, qui nuisent à sa capacité à emprunter.
Selon la direction de la BIAC, des négociations sont en cours avec le gouvernement pour permettre à la banque de revenir à une situation viable.
Le système bancaire congolais s'est rebâti péniblement à partir du milieu de la décennie 2000 après les deux guerres ayant ravagé la RDC entre 1997 et 2003, mais le taux de bancarisation du pays (ratio de la population adulte disposant d'un compte) est parmi les plus faibles d'Afrique.
Les difficultés de la BIAC risquent de renforcer la méfiance de la population vis-à-vis des banques et d'entraver ainsi les efforts des autorités pour tenter de créer une véritable épargne nationale susceptible d'aider au développement du pays, parmi les moins avancés de la planète.
Elles surviennent alors que les finances publiques de la RDC, cinquième producteur de cuivre de la planète, et petit producteur de pétrole, sont mises à rude épreuve par la chute des cours des matières premières, limitant les marges d'intervention budgétaire de l'État.
Avec AFP