En Egypte, les catholiques impatients d'accueillir le pape venu les soutenir

Le pape François salue la foule alors qu'il part de la messe à Carpi, Italie, le 2 avril 2017.

Percussions stridentes, volutes d'encens, prières en langue copte: dans une église du Caire, les fidèles catholiques attendent avec ferveur l'arrivée du pape François, qui vient "soutenir" les chrétiens d'Egypte endeuillés par des attentats meurtriers.

Le pontife argentin sera au Caire vendredi et samedi pour son premier voyage dans le plus peuplé des pays arabes, organisé sous le slogan "le pape de la paix en visite en Egypte de la paix".

Une visite qui prend un caractère hautement symbolique, après un double attentat suicide qui a frappé le 9 avril deux églises coptes orthodoxes dans le nord de l'Egypte, à Alexandrie et à Tanta.

"Évidemment tout le monde est inquiet après ce qui s'est passé", reconnaît Karim Saber, à la sortie de la messe organisée dimanche soir à la cathédrale copte catholique de la Vierge Marie, dans le nord du Caire.

"Mais en venant en Egypte, le pape nous montre que rien ne peut nous empêcher de prier, pas même le terrorisme", renchérit cet étudiant de 23 ans, une grande croix tatouée sur l'avant-bras.

Revendiqués par le groupe Etat islamique (EI) les attentats ont fait 45 morts le jour du dimanche des Rameaux. Et la menace pèse toujours: les jihadistes se sont engagés à multiplier les attaques contre les coptes, qui comptent pour environ 10% des 92 millions d'Egyptiens.

"Après chaque moment douloureux, il y a toujours quelque chose de beau qui apporte de la joie", assure Dina Fahmi, graphiste de 25 ans, sa chevelure de jais déployée sur un élégant manteau blanc. "Le pape, le chef de toute l'Eglise, vient nous soutenir, c'est une grande bénédiction", s'enthousiasme-t-elle.

Messe dans un stade

Malgré le contexte tendu, la petite communauté catholique --quelque 272.000 fidèles selon des statistiques du Saint-Siège-- est déterminée à offrir un accueil mémorable au pape.

L'Egypte, où l'écrasante majorité des chrétiens sont orthodoxes, compte des catholiques depuis le Ve siecle. Entre les XVIIIe et XIXe siècles, des ordres catholiques ((Franciscains, Dominicains, Jésuites) sont venus s'intaller, développant notamment un réseau d'écoles, d'hôpitaux et d'oeuvres caritatives.

Samedi, le pape François dirigera une messe dans un stade de la banlieue du Caire, réunissant tous les rites catholiques du pays, notamment les églises copte, arménienne, maronite et melkite.

Alors, dans une salle adjacente à l'église Saint-Joseph des pères Franciscains, dans le centre du Caire, une des chorales qui doit animer la cérémonie tient ses dernières répétitions.

Les voix de soprano, ténor et basse s'élèvent majestueusement, déclamant des chants en arabe, italien et français, qui se mêlent aux sons du piano, de la flûte traversière et du saxophone.

Magdeline Michel, chef de choeur, guide de ses amples mouvements de bras une vingtaine de chanteurs. "Pour l'uniforme, on a dit chemise blanche et pantalon noir", lance-t-elle au petit groupe, dans un arabe ponctué de mots de français aux accents chantants.

"Evidemment c'est un grand honneur pour nous", se réjouit la quadragénaire. "Ce n'est pas quelque chose qui risque de se reproduire de notre vivant", s'enthousiasme-t-elle.

"Sa visite (du pape), malgré le contexte c'est quelque chose qui nous rassure", poursuit cette enseignante de français avant d'ajouter: "Il vient nous soutenir, et ça nous permet de nous sentir en sécurité".

'Du côté des pauvres'

Des propos qui font écho à ceux du Patriarche des coptes catholiques Ibrahim Isaac, pour qui la venue du pape représente un soutien "moral et spirituel" au moment où "la succession des incidents suscite beaucoup de déception. Il y a parfois de la colère".

En décembre déjà, un kamikaze de l'EI s'était fait exploser dans une église du Caire, tuant 29 personnes.

Le pontife argentin doit aussi s'entretenir avec le président Abdel Fattah al-Sissi, le pape des coptes orthodoxes Tawadros II et le cheikh Ahmed al-Tayeb, grand imam d'Al-Azhar.

"La visite est très importante pour consolider le dialogue interreligieux", confirme l'évêque Yohana Kolta du patriarcat copte catholique. "Le pape François a rétabli les ponts qui avaient été coupés", poursuit-il.

Le déplacement intervient 17 ans après celui de Jean-Paul II, qui avait marqué les esprits.

"Il était très aimé des chrétiens, mais aussi des musulmans, il représentait la bonté et l'amour aux yeux de tout le monde", se souvient l'évêque, qui ne tarit pas non plus d'éloge au sujet du pape actuel: "le pape François est argentin, il vient du tiers-monde, il est du côté des pauvres et des faibles".

Avec AFP