Erdogan réunit des dirigeants du monde musulman pour faire condamner Israël

Recep Tayyip Erdogan, Alger, Algérie, le 27 fevrier 2018

Le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui tire à boulets rouges sur Israël depuis le carnage de Gaza, accueille vendredi des dirigeants du monde musulman pour faire condamner l'Etat hébreu, mais peu de mesures concrètes sont attendues en raison de divisions.

Ce "sommet extraordinaire" de l'Organisation de la coopération islamique (OCI) aura lieu sous la présidence de M. Erdogan à Istanbul, où se déroulera également un immense rassemblement populaire de soutien aux Palestiniens dans l'après-midi.

M. Erdogan, qui s'est signalé par ses critiques extrêmement virulentes contre Israël depuis la mort lundi de 60 Palestiniens sous les balles israéliennes à Gaza, a dit espérer que l'OCI enverrait "un message très fort" lors de la réunion d'Istanbul.

La Turquie préside actuellement ce groupement, qui s'était déjà réuni en sommet à Istanbul en décembre à l'appel de M. Erdogan pour condamner la décision du président Donald Trump de transférer l'ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem.

Le carnage à Gaza a eu lieu alors que des milliers de Palestiniens manifestaient près de la clôture de sécurité le jour de l'inauguration de la nouvelle ambassade américaine à Jérusalem.

Issu de la mouvance islamo-conservatrice, M. Erdogan se pose en ardent supporteur de la cause palestinienne et ne cache pas son soutien au mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza, bête noire des autorités israéliennes. Ce discours trouve un écho chez l'électorat traditionnel de M. Erdogan, candidat à sa propre succession lors des élections anticipées prévues le 24 juin, et lui a permis de bâtir une certaine popularité dans le monde arabe.

"Si le silence persiste face à la tyrannie israélienne, le monde va s'enfoncer rapidement dans un chaos où les bandits feront la loi", a lancé mercredi le président turc.

- Divisions -

Mais la réunion d'Istanbul se tient au moment où le monde arabo-musulman est miné par des divisions et des rivalités qui rendent peu probable toute mesure concrète à l'égard d'Israël.

L'Arabie saoudite, dont le ministre des Affaires étrangères Adel al-Jubeir est attendu à Istanbul, et ses alliés du Golfe ainsi que l'Egypte, voient d'un mauvais oeil le soutien de la Turquie d'Erdogan à des mouvements comme les Frères musulmans et le Hamas, et au Qatar, qu'ils cherchent à isoler.

Ryad et ses alliés, qui semblent avoir assoupli leurs positions vis-à-vis d'Israël, seraient en outre réticents à d'éventuelles actions susceptibles d'aliéner Washington dont ils espèrent le soutien pour endiguer l'Iran chiite, qu'ils voient comme la principale menace dans la région.

Le président palestinien Mahmoud Abbas, qui s'est fait opérer d'une oreille la semaine dernière, n'assistera pas à la réunion. Il sera représenté par son Premier ministre Rami Hamdallah.

Parmi les chefs d'Etat attendus à Istanbul figurent le roi Abdallah de Jordanie, le président soudanais Omar el-Béchir ainsi que les émirs du Qatar et du Koweit.

La réunion se tient au moment où la Turquie et Israël s'écharpent à coups d'invectives et de sanctions diplomatiques depuis le bain de sang de Gaza.

Ankara a ainsi demandé le départ "provisoire" de l'ambassadeur d'Israël en Turquie Eitan Naeh - qui a effectivement quitté le pays mercredi - et celui du consul général d'Israël à Istanbul. Israël a pris une mesure similaire à l'encontre du consul général turc à Jérusalem.

Rétorquant aux critiques véhémentes de M. Erdogan, qui l'a accusé d'être à la tête d'un "Etat d'apartheid" et d'avoir du "sang" de Palestiniens sur les mains, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a affirmé qu'il n'avait pas de "leçons de morale" à recevoir d'un dirigeant turc qui "comprend parfaitement le terrorisme et les massacres".

Outre le sommet de l'OCI, M. Erdogan doit s'adresser à un immense rassemblement populaire de soutien aux Palestiniens auquel il a appelé, sous le slogan de "Halte à l'oppression !".

Avec AFP