Depuis le début d'une vague d'intempéries au Soudan il y a deux semaines, une centaine de personnes au moins sont mortes dans l'ensemble du pays, dont 25 à Kassala (est), et des milliers de maisons ont été détruites, selon le Croissant-Rouge soudanais.
Des véhicules chargés de matériel de construction et d'aides sont actuellement coincés dans l'Etat de Kassala, faute de routes praticables même si les autorités sont en train de réparer les voies endommagées, selon un correspondant de l'AFP.
Des travailleurs humanitaires ont estimé qu'il faudrait encore des jours avant que l'aide puisse parvenir aux zones affectées par les inondations, les pires à frapper cette région pauvre depuis des années.
Selon eux, des tonnes de matériel sont arrivés mais les ONG et les responsables du gouvernement ne sont pas en mesure de les dispatcher aux zones affectées.
"L'autoroute a été coupée. D'autres routes rurales sont aussi endommagées, rendant difficile l'accès aux villageois coincés dans des secteurs reculés", explique Hussain Saleh, qui travaille avec l'ONG Tlawaiet, basée à Kassala.
L'hélicoptère, "trop cher"
"La seule façon de les atteindre, c'est par hélicoptère. Or c'est très cher pour des ONG locales comme nous", se désole-t-il.
Des milliers d'habitants de l'Etat de Kassala ont fui leurs maisons détruites après une crue de la rivière Gash qui a inondé des villages entiers situés à des dizaines de kilomètres plus loin.
Les pluies diluviennes ont coupé la principale autoroute reliant Kassala à Port Soudan, plus au nord, et ont aussi inondé les rails d'une ligne ferroviaire traversant la région.
Un membre d'une ONG travaillant dans le secteur médical a indiqué qu'il y avait une forte hausse des cas de malaria dans les villages touchés par les inondations.
"Le transport des médicaments est un gros problème car l'autoroute est coupée", a-t-il dit sous couvert de l'anonymat.
"Jusqu'à présent, on n'a pas pu atteindre les villages" affectés", a-t-il ajouté.
Le gouverneur de Kassala, Adam Jamaa, a pour sa part affirmé que les personnes touchées par les inondations ont déjà reçu de l'aide.
"Depuis le début, nous maîtrisons la situation", a-t-il assuré à l'AFP.
"Nous avons fourni de la nourriture, des abris et des médicaments aux gens dans le besoin", affirme-t-il.
Cependant, le journaliste de l'AFP qui s'est rendu lundi et mardi dans plusieurs secteurs touchés par les inondations n'a vu ni travailleur humanitaire, ni signe d'aide.
Des centaines de familles continuent de vivre sous des abris fabriqués avec les moyens du bord ou le long des routes endommagées.
"Ca fait 10 jours maintenant. Personne ne nous a apporté d'eau potable ou de nourriture", se lamente Tahir Osheikh, dont le village se trouve à 70 km de la rivière Gash.
Boire de l'eau boueuse
Sa famille, comme des centaines d'autres, doit survivre en buvant de l'eau boueuse.
"Notre stock de nourriture est entièrement perdu. Nous voulons acheter du sorgho, mais pour cela il faudrait aller dans la ville de Kassala et c'est très cher", poursuit M. Osheikh, en référence à l'aliment de base au Soudan.
Derrière lui, sa femme met de l'eau boueuse à bouillir dans une casserole, et certains enfants en boivent.
Selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha), les Etats les plus touchés sont Kassala, Sannar, le Kordofan du Sud, le Kordofan de l'Ouest et le Darfour du Nord.
L'Ocha a indiqué la semaine dernière que les inondations avaient touché plus de 122.000 personnes et détruit plus de 13.000 habitations depuis début juin dans plusieurs régions du Soudan.
"Cette nuit, moi, mes enfants et ma femme, on dormira à même le sol, à la belle étoile", confie Mohamed Issa, un habitant de Kassala.
Il explique que ses enfants ont peur de dormir dehors.
"L'enfant de notre voisin est mort après avoir été piqué par un serpent durant la nuit", raconte-t-il.
"Avec les eaux de pluie, il y a beaucoup de serpents", dit-il.
Les habitants de l'Etat de Kassala, en majorité des fermiers, ont connu des inondations dans le passé, mais cette année a été la pire depuis très longtemps, disent certains.
"Les inondations ont englouti nos récoltes et tué notre bétail", se lamente Osman Ali.
Avec AFP