Ces derniers mois, l'insurrection jihadiste installée dans la province de Cabo Delgado depuis trois ans monte en puissance, avec davantage d'attaques et la prise d'un port stratégique à la mi-août.
Les forces gouvernementales peinent à reprendre l'avantage, affirmant que les jihadistes se mêlent à la population locale, alors qu'elles cherchent à sécuriser de très importantes installations gazières dans cette zone.
Amnesty International, qui avait alerté la semaine dernière sur des cas de tortures de militants jihadistes aux mains des militaires mozambicains, a demandé mardi soir une enquête indépendante au sujet de la vidéo de l'exécution de cette femme, largement relayée sur les réseaux sociaux depuis la veille.
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"Le Mozambique doit immédiatement lancer une enquête indépendante et impartiale sur cette exécution d'une femme enceinte sans défense", a affirmé l'ONG dans un communiqué.
Le gouvernement avait promis une enquête dès la veille. Mais le ministre de l'Intérieur Amade Miquidade a affirmé mardi que les tueurs étaient des jihadistes déguisés portant des uniformes "identiques" à celui des militaires.
"La vidéo montrant des atrocités commises contre une femme enceinte est de la propagande de la part des terroristes", a-t-il affirmé dans une déclaration enregistrée. "Elle a été faite par des terroristes (...) pour induire en erreur et ce n'est pas la première fois que cela arrive".
Avant sa diffusion sur les réseaux sociaux, la vidéo, qui montre ces hommes frappant la femme enceinte, avant de cribler de 36 balles son corps nu, avait été partagée sur des téléphones mobiles dès le 7 septembre, date probable de son enregistrement, a avancé Amnesty.
Pour Amnesty, cette vidéo est "encore un terrible exemple des violations flagrantes des droits de l'Homme et des tueries impitoyables qui ont lieu actuellement dans la province de Cabo Delgado par les forces de sécurité mozambicaines".
Selon l'ONG, la vidéo aurait été tournée sur une route à proximité de la petite ville d'Awasse.
On y entend les tueurs crier en portugais à cette femme qu'elle est un membre d'Al-Shabab, le surnom donné aux jihadistes opérant dans la région, affiliés au groupe État islamique (EI).
Pour Deprose Muchena, directeur d'Amnesty pour l'Afrique australe, ce cas concorde avec les récentes découvertes de violations des droits de l'Homme et de crimes "commis par les forces armées mozambicaines".
Pour Zenaida Machado, de Human Rights Watch, le gouvernement peine à mettre au pas ses militaires. "Au lieu de ça, ils se lancent dans une campagne de dénégation, une campagne contre les groupes comme nous, les militants et tous ceux ceux qui condamnent l'attitude et le comportement des forces de sécurité".
Depuis 2017, les attaques de groupes armés jihadistes ont causé la mort de 1.500 personnes et fait plus de 250.000 déplacés, selon l'ONU et les ONG.