Le Premier ministre français est en déplacement presque toute la journée à Nancy (Est), alors que le président de la République s'envole pour les Emirats arabes unis pour une conférence internationale.
"Sans moi", "La Fin", "Au revoir, président", "Hollande capitule" titrait la presse française au lendemain de ce scénario inédit sous la Ve République: un chef de l'Etat renonçant à se représenter. Avec cette phrase prononcée d'une voix blanche: "Aussi, j'ai décidé de ne pas être candidat à l'élection présidentielle".
Deux questions se posent désormais pour Manuel Valls, héritier putatif: quand se déclarer avant la date-butoir pour les inscriptions à la primaire de la gauche, le 15 décembre ? Et doit-il aussitôt quitter Matignon et son poste de chef du gouvernement ?
Il est peu probable que ce déplacement en province fournisse le théâtre adéquat, de surcroît si peu de temps après la "mort" politique de François Hollande, à laquelle le Premier ministre n'est pas étranger.
Samedi, le Premier ministre doit -en principe- s'exprimer en meeting à Paris, à l'appel du Parti socialiste (PS). Mais une déclaration personnelle à cette occasion risque de voir la direction du PS s'attirer les foudres des autres candidats déclarés à la primaire, comme Arnaud Montebourg ou Benoît Hamon, d'anciens ministres.
- Impopularité record -
A l'Elysée, le président a fait sa déclaration de renonciation sans dire qu'il soutenait son Premier ministre, ni même le citer. Mais les deux hommes se sont parlé à deux reprises, avant et après l'annonce, selon l'entourage de M. Valls.
Avec la voie désormais libre pour une candidature, le Premier ministre devrait poursuivre son entreprise de rassemblement, entamée depuis plusieurs semaines. Souvent clivant dans son camp, M. Valls s'est efforcé d'arrondir les angles pour peaufiner son profil de présidentiable.
Mais il hérite d'une position guère plus enviable, à en croire les sondages réalisés avant l'abandon de M. Hollande: il est crédité de 9% à 11% seulement d'intentions de vote, selon de récents sondages. Lui aussi derrière son ex-ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, et le candidat de la gauche de la gauche, Jean-Luc Mélenchon.
Impopulaire à des niveaux records, François Hollande s'est attiré des hommages jusqu'à droite en renonçant. "Dignité", "respect" et "courage" revenaient dans nombre de commentaires, y compris de ceux qui ont trahi ou affaibli le président.
- 'Décision sage' -
"Décision sage, réaliste et hautement respectable", selon Arnaud Montebourg. "Courageuse" et "digne" pour Emmanuel Macron. "Choix d'un homme d'Etat" pour Manuel Valls.
"Un moment de dignité comme la politique en était devenue avare. L'exigence pour les gauches est colossale", a pour sa part jugé Christiane Taubira, ex-ministre de la Justice, partie du navire gouvernemental dans le sillage du controversé projet de déchéance de nationalité.
Certains à gauche poussent l'ancienne ministre de la Justice, dont la ligne diffère nettement de celle de M. Valls, à se lancer dans la course.
Pour l'ancien Premier ministre François Fillon, candidat de la droite pour 2017 et nouveau favori des sondages après son triomphe à la primaire de la droite, François Hollande a "admis avec lucidité son échec".
Du côté de l'extrême droite, au Front national, le bras droit de Marine Le Pen, Florian Philippot, a déjà ciblé MM. Fillon et Valls, en les qualifiant de "doublures" de leurs présidents Sarkozy et Hollande: "2 présidents de la République hors course en 2 semaines. A quoi cela servirait-il de faire courir leurs doublures, leurs seconds ?", a-t-il lancé sur Twitter.
AvecAFP