Entamé il y a plus d'un mois, le bras de fer entre les syndicats contestataires et le gouvernement ne faiblit pas.
Plus de 120.000 personnes ont manifesté dans près d'une trentaine de villes hors Paris, selon un décompte provisoire de l'AFP réalisé à partir des chiffres de la police ou des préfectures. Quasiment toutes les villes s'inscrivaient en deçà de la jauge de la première journée de manifestations, le 5 décembre.
De leur côté, les syndicats revendiquaient près de 600.000 manifestants dans 27 cortèges.
Lire aussi : Réforme des retraites en France: peu de trains sous le sapinÀ Paris, plusieurs milliers de manifestants, parmi lesquels des cheminots, enseignants ou encore des avocats, ont commencé à défiler en début d'après-midi. "Retraite par points: tous perdants! Retraite à 60 ans: tous gagnants! Macron retire ton plan", proclamait la banderole de tête.
Dans leur viseur également: le gestionnaire d'actifs américain BlackRock, accusé de vouloir profiter de cette réforme et représenté sous la forme de vautours.
Le système de retraite à points voulu par le gouvernement vise à fusionner les 42 régimes existants, dont des régimes spéciaux qui permettent notamment aux conducteurs de train de partir plus tôt.
La réforme prévoit en outre d'instaurer un "âge pivot", 64 ans, pour inciter financièrement les Français à travailler au-delà de l'âge légal de départ à la retraite (62 ans aujourd'hui).
L'exécutif promet un dispositif "plus juste" mais les opposants redoutent un départ plus tardif et des pensions plus basses.
Cette réforme est une mesure phare du quinquennat du président Emmanuel Macron. L'exécutif a jusqu'ici affiché sa détermination à la mener à bien.
Depuis le 5 décembre, le mouvement de protestation perturbe principalement la circulation des trains en France et les transports publics en région parisienne, entraînant d'innombrables difficultés pour les usagers.
- "Amer" -
Cette grève atteint déjà une durée inégalée en France, dépassant le précédent record de 28 jours consécutifs, établi en 1986-87. Au sein de la compagnie ferroviaire SNCF, le conflit est le plus long depuis sa création en 1938.
Lire aussi : Réformes des retraites en France: 8e jour de grève, le gouvernement veut rouvrir le dialogue"Il y a lieu d'être amer de se retrouver là le 9 janvier après 36 jours de conflit, trois grands défilés dans la rue, (...) pour être toujours au même point avec le gouvernement qui s'entête (...) qui prétend faire des ouvertures mais n'en fait pas", a déploré jeudi François Hommeril, président du syndicat des cadres CFE-CGC.
La CGT, Force ouvrière et d'autres organisations syndicales, rassemblées en intersyndicale, réclament le retrait du projet, avant toute discussion.
La CFDT, syndicat réformiste qui soutient le principe général de la réforme, est fermement opposée à l'âge pivot et le système de décote/surcote qu'il induit.
"Pour la CFDT, c'est non, c'est clair", a réaffirmé Laurent Berger, le secrétaire général du premier syndicat français, à l'AFP.
En début de semaine, le Premier ministre Edouard Philippe lui avait tendu la main en proposant une "conférence de financement", suggérée par le leader syndicaliste.
Il a invité les partenaires sociaux vendredi pour en parler, au lendemain de cette nouvelle journée de mobilisation.
Des concessions ont également été faites par l'exécutif à plusieurs corps de métier, comme les policiers, les danseurs de l'Opéra, les marins, les pilotes...
La compagnie ferroviaire SNCF, qui a appelé les Franciliens à éviter les trains de banlieue, annonçait un trafic "très perturbé" jeudi. Des "perturbations et retards" également été annoncés dans le transport aérien.
Les grèves se poursuivent également dans d'autres secteurs, notamment chez les avocats ou dans les raffineries, ainsi que dans l'éducation nationale, et la Tour Eiffel était à nouveau fermée.
Le gouvernement n'entend pas modifier le cours de son projet de loi. Il doit être présenté en Conseil des ministres le 24 janvier et examiné par l'Assemblée à partir du 17 février.
Mais jeudi, le président du Sénat Gérard Larcher a demandé solennellement "au gouvernement d'attendre les résultats de la conférence de financement avant de saisir le Parlement d'un projet de loi". Selon lui, "il faut reprendre le sujet de façon sérieuse: combien cela va coûter ? Et aussi dans ses conséquences sociales ?".