Manuel Valls, 54 ans, qui s'est lancé dans la course à l'investiture après le forfait de l'impopulaire président François Hollande, a été devancé dimanche au premier tour de la primaire socialiste par un outsider de 49 ans issu de l'aile gauche du parti et très critique sur le bilan du gouvernement.
La presse française voyait lundi dans ce duel "le choc de deux gauches" et l'illustration d'un parti socialiste profondément divisé entre une ligne "utopiste" et une autre "hyperréaliste".
Le quotidien économique Les Echos soulignait notamment un "besoin de renouveau qui s'exprime une nouvelle fois" en se demandant toutefois si cette "surprise" peut "suffire à rallumer la lumière dans la maison PS".
Le premier tour, avec sept candidats en lice, a peu mobilisé avec entre 1,6 et 1,7 million d'électeurs, selon de premières estimations. En novembre, plus de quatre millions de personnes s'étaient déplacées pour désigner le candidat de la droite, le conservateur François Fillon.
En cause, une forte déception des électeurs de gauche face à une politique jugée contraire aux valeurs de leur camp: la proposition de déchoir de leur nationalité les Français condamnés pour terrorisme, des lois visant à libéraliser l'économie et le droit du travail, l'accueil a minima des réfugiés...
"La volonté de tourner la page est claire. Il s'agit de regarder vers le futur", a plaidé lundi matin Benoît Hamon, qui défend un "revenu universel d'existence" et se veut "beaucoup plus généreux en matière de droit d'asile".
- 'Promesses irréalisables' -
Fort de ses 36%,Hamon peut déjà compter sur le ralliement du candidat arrivé en troisième position, Arnaud Montebourg (17,6%), lui aussi très critique sur la politique de François Hollande.
Manuel Valls (31%), a, lui, appelé les électeurs à faire le choix au second tour entre "la défaite assurée" s'ils désignent son concurrent et "la victoire possible" à la présidentielle avec lui.
En attendant le duel télévisé mercredi soir, M. Valls a dénonçé les "promesses irréalisables et infinançables" de son adversaire. "Jamais la gauche française n'a été confrontée depuis très longtemps à un choix aussi clair", a-t-il estimé lundi.
Des déclarations qui rendent aléatoire le rassemblement des deux prétendants autour d'un seul candidat après le second tour, condition indispensable pour conjurer un scénario d'échec.
Le gagnant de la primaire aura en effet fort à faire pour s'imposer.
Pour l'instant, le second tour de la présidentielle, le 7 mai, semble se diriger vers un duel entre François Fillon et la chef de file du Front national Marine Le Pen, sur fond de montée en puissance des courants populistes en Europe.
La dirigeante de l'extrême droite Marine Le Pen, galvanisée par le Brexit et l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, a d'ailleurs promis dimanche que 2017 serait "l'année du réveil des peuples de l'Europe continentale", en France, en Allemagne et aux Pays-Bas.
Un troisième homme les talonne : Emmanuel Macron. A 39 ans, cet ancien ministre du gouvernement socialiste fait cavalier seul et suscite l'affluence dans ses meetings avec son message "ni droite ni gauche", "progressiste" et pro-européen.
Et de nombreux commentateurs politiques jugeaient que le résultat du premier tour ouvrait un boulevard à Emmanuel Macron, qui se présente pour la première fois à un mandat électif et parie sur l'envie de renouveau des Français.
"Les électeurs de Manuel Valls ne se reconnaîtront pas dans le projet politique de Benoît Hamon comme les électeurs de Benoît Hamon ne se reconnaîtront pas dans le programme de Manuel Valls. On va donc se retrouver dans une synthèse bancale à la fin de cette primaire", analysait d'ailleurs dimanche soir Benjamin Griveaux, soutien d'Emmanuel Macron.
Ayant également refusé de participer à la primaire, le trublion de l'extrême gauche Jean-Luc Mélenchon, se positionne en quatrième position dans les sondages, assombrissant encore les chances du PS.
Avec AFP