Funérailles de l'opposant Tshisekedi en RDC : embrouilles autour d'un cercueil

Des personnes endeuillées se réunissent pour rendre hommage à Etienne Tshisekedi lors d'une cérémonie à Bruxelles, à Belgique, le 5 février 2017.

L'organisation des obsèques de l'opposant congolais Étienne Tshisekedi à Kinshasa se complique et prend un tour polémique après une succession d'exigences présentées par son parti et jugées "inadmissibles" par le gouvernement de la République démocratique du Congo.

Opposant à tous les pouvoirs depuis 1980, Tshisekedi est mort le 1er février à Bruxelles à 84 ans. Lundi, le retour de sa dépouille avait été annoncé pour la fin de la semaine.

Mais le parti de Tshisekedi, l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), a lié l'arrivée du cercueil à l'application d'une clause de l'accord de cogestion du pays signé le 31 décembre entre l'opposition et le pouvoir, et plus personne aujourd'hui ne se risque à avancer une date pour ce rapatriement.

L'accord de la Saint-Sylvestre est destiné à sortir la RDC de la crise provoquée par le maintien au pouvoir du président Joseph Kabila au-delà du terme de son mandat (échu depuis le 20 décembre) et à organiser la tenue d'une présidentielle "fin 2017".

Il prévoit la nomination d'un nouveau Premier ministre issu du "Rassemblement", coalition d'opposition formée autour de Tshisekedi, mort quatre jours après la suspension de négociations infructueuses sur le partage des postes au sein du futur gouvernement d'union.

L'Église catholique, qui parraine ces négociations, a annoncé que les pourparlers ne reprendraient qu'après l'enterrement, le gouvernement souhaitant de son côté aider à l'organisation de "funérailles dignes" du Premier ministre que fut Tshisekedi au début de la décennie 1990.

Mais l'UDPS a commencé à exiger la reprise sans délai des discussions, liant le retour de la dépouille de Tshisekedi à la nomination d'un nouveau Premier ministre et à son entrée en fonctions à la tête du nouveau gouvernement.

Interrogé par l'AFP, le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende, a jugé ces demandes "inadmissibles" et "irresponsables".

Mardi soir, après des discussions avec la famille et le parti de M. Tshisekedi sur l'organisation des obsèques, M. Mende déclare à la télévision nationale que l'État met à disposition le Parlement "comme lieu d'exposition de la dépouille pour [...] les hommages officiels et populaires".

M. Mende, annonce également la mise à disposition par l'État - "à la demande de la famille" - de billets d'avion pour Bruxelles pour un certain nombre de cadres de l'UDPS ou de parents du défunt.

- 'Mausolée au centre-ville' -

Mercredi, l'UDPS se fend d'une "mise au point" dans laquelle elle dit être "très indignée par [un tel] comportement récupérateur du régime en place face au deuil du président Étienne Tshisekedi".

Seules "les familles biologique et politique du défunt" sont habilitées à organiser les obsèques, ajoute le parti, "ipso facto, l'UDPS n'est pas intéressée par l'offre des titres de voyage faite par l'actuel gouvernement".

L'UDPS n'en pose pas moins deux conditions à la communication par ses soins des "dates du rapatriement et de l'enterrement" : "l'érection d'un mausolée au centre-ville de Kinshasa" et "la prise en charge de tous les frais liés aux obsèques par l'État congolais à travers le gouvernement de large union nationale en vue".

Car l'UDPS a un problème avec "l'actuel gouvernement" : il est dirigé par Samy Badibanga, ex-conseiller de Tshisekedi entré en fonctions la veille de la fin du mandat de M. Kabila à la suite d'une alliance politique signée avec le pouvoir en octobre.

"Ce n'est pas le gouvernement Badibanga qui organisera ces obsèques. Ça, nous ne l'accepterons jamais", dit à l'AFP Augustin Kabuya, porte-parole de l'UDPS.

"Ce sont des gesticulations, des états d'âme de ceux qui n'ont pas trouvé leur compte dans l'accord du 31 décembre", a réagi à l'AFP M. Mende pour qui "le gouvernement ne voit aucun inconvénient à ce que le mausolée soit construit hors du centre-ville" de Kinshasa.

Sur Twitter, plusieurs internautes s'émeuvent que toute cette polémique n'ait qu'une seule conséquence : rendre encore un peu plus incertaine la tenue d'une présidentielle à la fin de l'année, perspective jugée déjà peu réaliste.

Avec AFP