Dans le sud-est du Nigeria, les rues étaient désertes lundi, les habitants ayant préféré rester chez eux pour exprimer leur désaccord avec la détention de Nnamdi Kanu, un leader du mouvement séparatiste Biafra.
La manifestation silencieuse a été organisée par Indigenous People of Biafra (IPOB), un groupe pourtant banni par les autorités, mais dont les revendications trouvent l’assentiment généralisé des populations de cette partie du Nigeria.
C’est en juin que Nnamdi Kanu a été ramené au Nigeria après des années en cavale. Il est en détention dans l'attente d'un procès pour 11 chefs d'accusation, dont la trahison.
A Onitsha et dans les villes d'Enugu, d'Awka et d'Owerri, les marchés habituellement animés étaient calmes, selon des témoins. Les routes étaient libres de toute circulation et même certains étudiants qui devaient passer des examens ne se sont pas présentés.
"Onitsha est totalement fermée. Aucun véhicule ne circule", a déclaré Caroline Madu, une habitante. "L'État tout entier est totalement fermé par solidarité avec Nnamdi Kanu. Ils devraient le libérer car il n'a rien fait de mal", a-t-elle ajouté.
L'IPOB fait campagne pour que le sud-est du Nigeria, patrie du groupe ethnique Igbo, se sépare du Nigeria.
Déjà en 1967, la région avait tenté de faire sécession pour créer la République du Biafra. Un geste qui avait déclenché une guerre civile de trois ans au cours de laquelle plus d'un million de personnes sont mortes, principalement de faim.
Malgré l’annonce officielle qu’il n’y a eu "ni vainqueur, ni vaincu" après la défaite du Biafra, de nombreux Igbo estiment avoir été constamment victimes de discrimination de la part du gouvernement fédéral et de l’ensemble du Nigeria en général.
L'IPOB affirme être un groupe non-violent, mais les autorités accusent ses membres d'attaquer des postes de police et d'autres cibles. Le gouvernement s'oppose fermement à l'IPOB, accuse ses membres d'activités criminelles et ne reconnaît aucune des doléances locales.
Mécontentement généralisé
Selon Amnesty International, les forces de sécurité de l'État ont tué au moins 115 personnes dans le sud-est cette année et arrêté arbitrairement ou torturé des dizaines d'autres, en réaction aux activités séparatistes. Les autorités n'ont pas fait de commentaires sur ces conclusions.
La répression a exacerbé le mécontentement dans le sud-est, où les habitants la considèrent comme disproportionnée par rapport à ce qu'ils perçoivent comme un manque d'action contre les éleveurs de l'ethnie Fulani du nord, qui se heurtent fréquemment aux agriculteurs.
Le président Muhammadu Buhari est également impopulaire en raison de son incapacité apparente à lutter contre la criminalité endémique et à améliorer l'économie.
"Il suffit de voir comment Buhari a mis le Nigeria sens dessus dessous. Les salaires ne sont pas payés, les gens sont massacrés comme des volailles par les bergers fulanis et les bandits dans tout le pays", a déclaré Anayo Eze, un fonctionnaire.
"Il ne s'agit pas seulement de Nnamdi Kanu et de l'IPOB. Il s'agit d'un gouvernement et d'un pays en faillite", a-t-il ajouté.