Les premiers vaccins devaient être injectés dès cette semaine dans le pays africain le plus affecté par la pandémie. Mais le gouvernement a été forcé dimanche à annoncer une pause, après la publication d'une étude révélant une efficacité "limitée" contre le variant sud-africain, réputé plus contagieux et largement responsable de la seconde vague dans le pays.
A la traîne dans la course mondiale aux vaccins, la première puissance industrielle d'Afrique a reçu la semaine dernière un million de doses fabriquées en Inde et doit en recevoir 500.000 de plus courant février. Il s'agit, pour la totalité, du vaccin britannique AstraZeneca/Oxford.
Lire aussi : L'Algérie commence à inoculer sa population contre le covid, avec le vaccin russeCes vaccins pourraient bien être administrés mais de manière échelonnée et sur une population restreinte de quelque 100.000 personnes dans un premier temps, pour en étudier les effets et notamment vérifier s'il protège contre les formes graves de la maladie, a expliqué lundi à l'AFP l'épidémiologiste et coprésident du comité scientifique au ministère de la Santé, le Pr. Salim Abdool Karim.
Appelant à la prudence, il a précisé que ces essais pourront prendre "plusieurs semaines". Ensuite, "nous pourrons évaluer s'il faut continuer avec les 1,5 million de doses (AstraZeneca) dont nous disposons ou s'il faut arrêter".
L'étude dévoilée dimanche, réalisée sur 2.000 personnes par l'université du Witwatersrand à Johannesburg, affirme que le vaccin britannique offre une "protection limitée contre les formes modérées de la maladie dues au variant sud-africain, chez les jeunes adultes".
"Portefeuille"
Selon ces résultats, toutefois pas encore examinés par des pairs, il serait efficace à seulement 22%. Aucun résultat n'est encore disponible sur son efficacité contre les formes graves.
Les recommandations du comité scientifique seront examinées par le gouvernement lors d'une série de réunions cette semaine.
En attendant, le ministre sud-africain a assuré que d'autres vaccins des laboratoires Johnson & Johnson et Pfizer seront livrés dans les prochaines semaines.
Des discussions avec d'autres laboratoires sont également en cours, notamment avec Moderna, des laboratoires chinois ainsi qu'avec le fabricant du vaccin russe Spoutnik V.
"Nous allons utiliser un portefeuille diversifié de vaccins", a expliqué M. Karim.
Selon le principal parti d'opposition, ce revers met en évidence le manque d'anticipation du gouvernement. "Nous aurions dû prendre en compte la possibilité d'un changement de l'efficacité ou des retards dans la stratégie de déploiement et nous assurer que nous étions préparés à cela", a déclaré l'Alliance Démocratique (DA) lundi dans un communiqué.
"Un problème ?"
L'organisation mondiale de la Santé (OMS) doit publier cette semaine des recommandations sur les personnes à qui ce vaccin devrait ou ne devrait pas être administré.
"Nous pensons que notre vaccin protégera quand même contre les formes graves de la maladie", a affirmé AstraZeneca après la publication de l'étude de l'université du Witwatersrand.
Selon la vaccinologue sud-africaine Clare Cutland, interrogée par l'AFP, l'échantillon utilisé dans l'étude est trop limité pour évaluer l'efficacité d'AstraZeneca contre les formes graves de la maladie.
"Voulons-nous qu'il prévienne les maladies légères et modérées, ou (...) réduire et prévenir les maladies graves?" a-t-elle interrogé.
L'Afrique du Sud n'atteindra peut-être pas l'immunité collective pour protéger des formes légères de la maladie, mais "ce n'est peut-être pas un problème énorme", explique-t-elle.
À ce jour, l'Afrique du Sud a comptabilisé près de 1,5 million de cas de coronavirus et plus de 46.200 décès. Le taux de mortalité est toutefois resté relativement faible, avec 92% de guérisons.
Les chercheurs d'AstraZeneca espèrent mettre au point une nouvelle version du vaccin, incluant la séquence du variant sud-africain, d'ici l'automne.