Dix-neuf crânes, des ossements divers et un scalp pris par les forces coloniales allemandes il y a plus d'un siècle ont été remis lors d'une cérémonie religieuse à Berlin à une délégation namibienne conduite par la ministre de la Culture, Katrina Hanse-Himarwa.
Ces restes étaient jusqu'ici en possession d'universités, de musées et de collections privées en Allemagne.
Lors de la remise, une secrétaire d'Etat allemand aux Affaires étrangères, Michelle Müntefering a demandé "le pardon du fond du coeur". Lundi, elle avait déjà estimé que l'Allemagne avait "encore fort à faire" pour assumer son passé colonial sur ce territoire africain (1884-1915).
Des excuses jugées cependant insuffisantes par les représentants des deux ethnies, victimes de ce que les historiens considèrent comme le premier génocide du XXe siècle.
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A l'extérieur de l'édifice religieux à Berlin où a eu lieu la cérémonie, une vingtaine de personnes ont protesté en brandissant des bannières où l'on lisait "Des réparations tout de suite!".
- Excuses en suspens -
"Nous sommes ici pour honorer nos héros et héroïnes qui ont été brutalement tués uniquement parce qu'ils ont refusé d'être colonisés et qu'ils ont osé résister à l'occupation de leurs terres ancestrales", a expliqué un chef Herero, Vekuii Rukoro.
Il a regretté que la cérémonie ait eu lieu dans une église plutôt que dans un bâtiment public où le gouvernement aurait pu présenter des excuses officielles. Un geste auquel Berlin n'est pas encore prêt pour ne pas ouvrir la voie à un flot de demandes de dédommagements financiers.
Le chef Herero a reproché au gouvernement allemand de commettre de "graves erreurs" en n'assumant pas pleinement son passé.
Le gouvernement allemand a déjà reconnu sa responsabilité dans les massacres et indiqué en 2016 qu'il prévoyait des excuses officielles dans le cadre de négociations avec la Namibie.
Mais les discussions sont toujours en cours, et les excuses en suspens.
"Des réparations, une reconnaissance et des excuses" sont les conditions d'une normalisation des relations diplomatiques entre l'Allemagne et la Namibie, a rappelé à cet égard la ministre Katrina Hanse-Himarwa à Berlin.
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L'Allemagne a jusqu'ici refusé de payer des réparations financières, préférant des compensations sous forme d'aide au développement. Elle dit avoir déjà versé dans ce cadre des centaines de millions d'euros à la Namibie depuis son indépendance de l'Afrique du sud en 1990.
- Techniques génocidaires -
Mais c'est tout le pays qui en profite. Or, les seules victimes sont les tribus Herero, qui représentent environ 7% de la population namibienne contre 40% au début du XXe siècle, et les Nama. Leurs représentants ont lancé une procédure judiciaire à New York pour exiger des réparations directement aux descendants des deux ethnies exterminées.
Privés de leurs terres et de leur bétail, les Herero s'étaient révoltés en 1904 contre les colons allemands, faisant une centaine de morts parmi les colons.
Envoyé pour mater la rébellion, le général allemand Lothar von Trotha avait ordonné leur extermination. Les Nama s'étaient soulevés un an plus tard et subirent le même sort.
Au total, au moins 60.000 Herero et environ 10.000 Nama perdirent la vie entre 1904 et 1908. Les forces coloniales allemandes avaient employé des techniques génocidaires: massacres de masse, exil dans le désert où des milliers d'hommes, femmes et enfants sont morts de soif, et camps de concentration comme celui tristement célèbre de Shark Island.
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Les ossements, en particulier les crânes de victimes, furent envoyés en Allemagne pour des expériences scientifiques à caractère racial. Le médecin Eugen Fischer, qui a officié à Shark Island et dont les écrits ont influencé Adolf Hitler, cherchait à prouver la "supériorité de la race blanche".
L'historien Christian Kopp, de l'ONG Pas de prescription pour les génocides, a exigé que la lumière soit enfin faite sur le nombre d'ossements en provenance de Namibie et d'autres anciennes colonies allemandes encore présents sur le sol allemand. Il n'y a "aucune transparence à ce sujet", a-t-il indiqué à l'AFP.
Avec AFP