En début d'après-midi, les rebelles syriens soutenus par Ankara "ont pris le village de Keklija, à 5 km à l'ouest de Jarablos et 3 km à l'intérieur du territoire syrien", a annoncé l'agence progouvernementale Anadolu, précisant que 1.500 rebelles étaient dans la zone.
Les Etats-Unis ont apporté leur soutien à l'opération "Bouclier de l'Euphrate" en matière de renseignements, de surveillance et de reconnaissance et avec des conseillers militaires.
Ils pourraient également fournir un soutien aérien au sol si le besoin s'en faisait sentir, a expliqué un responsable américain, qui voyage avec le vice-président américain Joe Biden, arrivé en Turquie mercredi, pour parler notamment de la résolution de la guerre en Syrie, dans laquelle Ankara a déclaré vouloir jouer un "rôle plus actif".
"Nous voulons aider les Turcs à débarrasser la frontière de l'EI", a expliqué ce responsable sous couvert de l'anonymat.
Mais le président turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré que l'offensive avait pour but de "mettre un terme" aux problèmes à la frontière turque et visait non seulement l'EI mais aussi les milices kurdes.
"Depuis 04H00 (01H00 GMT), notre armée a lancé une opération contre les groupes terroristes Daech (acronyme arabe de l'EI) et le PYD (Parti de l'Union démocratique - kurde) qui menacent notre pays dans le nord de la Syrie", a annoncé M. Erdogan.
"La Turquie ne tolérera aucun fait accompli en Syrie", a encore dit le chef de l'Etat.
La Turquie considère l'EI et le PYD comme des organisations terroristes et les combat alors que son allié américain soutient, au grand dam d'Ankara, les Kurdes, qui ont fait reculer les jihadistes sur le terrain en Syrie.
Seuls les combattants de l'EI sont présents à Jarablos, mais Ankara craint de voir les Kurdes se rapprocher de sa frontière, d'autant que ces derniers ont progressé vers le nord récemment.
Eradiquer l'EI
Plusieurs heures après le déclenchement de l'opération à l'aube, une dizaine de chars turcs sont entrés en Syrie et tiraient en direction de positions tenues par l'EI dans Jarablos, a constaté un photographe de l'AFP à Karkamis, petite ville turque de l'autre côté de la frontière évacuée la veille.
"Cette menace sera éradiquée dans un court délai", a déclaré le ministre de l'Intérieur Efkan Ala, laissant entrevoir une opération militaire rapide.
Un petit nombre de forces spéciales turques avait d'abord pénétré de quelques kilomètres à l'intérieur du territoire de la Syrie pour sécuriser la zone avant l'incursion.
Puis des F-16 turcs, appuyés par des avions de la coalition, ont largué des bombes sur des sites jihadistes à Jarablos -- pour la première fois depuis la destruction en novembre 2015 par la chasse turque d'un avion de combat russe au-dessus de la frontière turco-syrienne, selon les télévisions.
La localité de 30.000 habitants -- dont beaucoup de Turcomans, minorité turcophone de Syrie -- est le dernier point de passage contrôlé par l'EI à la frontière.
Après avoir été longtemps accusée de complaisance à l'égard des jihadistes, la Turquie affirme désormais qu'elle a pour objectif d'éradiquer l'EI.
Un nouvel attentat samedi à Gaziantep (sud-est), près de la frontière, a fait 54 tués lors d'un mariage kurde, et porte la marque du groupe jihadiste.
"Bourbier syrien"
Mais la Turquie est aussi soucieuse d'empêcher l'avancée des Forces démocratiques syriennes (FDS) de Minbej vers Jarablos. Les FDS sont une alliance de combattants kurdes et de groupes armés arabes luttant contre l'EI.
Ankara voit avec anxiété toute tentative des Kurdes de Syrie de créer une unité territoriale autonome le long de sa frontière.
Saleh Muslim, le coprésident du PYD, a vivement dénoncé l'opération sur Twitter: "La Turquie dans le bourbier syrien, sera vaincue comme Daech".
La France "a salué l'intensification des efforts de la Turquie, partenaire de la coalition, dans la lutte contre Daech" par la voix d'un porte-parole des Affaires étrangères.
La Syrie a condamné l'opération turque comme une "violation flagante" de son territoire.
La situation en Syrie, comme la question de l'extradition de l'ex-imam Fethullah Gülen, exilé aux Etat-Unis, que les autorités turques désignent comme le cerveau du putsch avorté du 15 juillet en Turquie, doivent figurer à l'ordre du jour des discussions du vice-président américain à Ankara.
Celui-ci a d'abord visité le Parlement bombardé par les putschistes, avant un entretien avec le chef du gouvernement, et devait rencontrer le président Erdogan.
Avec AFP