L'Assemblée approuve les perquisitions sans mandat au Burundi

Des policiers burundais lors d'affrontements avec des manifestants dans Bujumbura, le 26 avril 2015

L'Assemblée nationale du Burundi a adopté mercredi un projet de loi autorisant notamment les perquisitions de nuit et sans mandat d'un magistrat, dénoncées comme une atteinte à la démocratie par la société civile et l'opposition à un mois d'un référendum constitutionnel.

Le projet de loi portant modification du code de procédure pénale a été adopté au bout de huit heures de débat mercredi soir par 90 voix pour et 22 voix contre, a annoncé sur son compte Twitter l'Assemblée de ce pays en crise depuis l'annonce en avril 2015 de la candidature du président Pierre Nkurunziza à un troisième mandat controversé.

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Le texte doit désormais passer devant le Sénat puis être promulgué par M. Nkurunziza "le plus rapidement possible", selon un haut cadre du parti au pouvoir, le CNDD-FDD, s'exprimant sous couvert d'anonymat.

"Compte tenu de l'évolution de la criminalité au Burundi au cours des dernières années, il a fallu introduire de nouvelles règles dérogatoires au droit commun de la procédure pénale", a justifié Aimée-Laurentine Kanyana, la ministre de la Justice, en défendant son texte devant l'Assemblée.

Le projet de loi autorise aussi les forces de l'ordre à procéder à des "perquisitions multiples", visant des quartiers entiers, et donne le droit de perquisitionner des systèmes informatiques.

Ces nouvelles mesures pourront être appliquées dans des cas "de terrorisme, de trafic, de détention illégale d'armes ou de stupéfiants", selon Mme Kanyana.

Les députés de la coalition des indépendants Amizero y'Abarundi (Espoir des Burundais), qui regroupe des proches d'Agathon Rwasa, leader historique de l'ex-rébellion des FNL, ont voté contre ce projet de loi "contraire à la Constitution", a expliqué à l'AFP Pierre-Céléstin Ndikumana, président de ce groupe parlementaire.

"Le parti au pouvoir vient d'enterrer la démocratie au Burundi", s'est-il insurgé.

Pour Justine Duby, spécialiste du Burundi pour la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH), "c'est clairement une volonté de légaliser des pratiques illégales et arbitraires auxquelles les forces de l'ordre ont déjà recours depuis trois ans dans ce pays".

Elle rappelle à cet égard que les médias indépendants, les ONG locales et internationales rapportent régulièrement des cas de quartiers ceinturés par les forces de l'ordre et des perquisitions et arrestations sans mandats, surtout dans les anciens quartiers contestataires de la capitale.

"C'est également une volonté de légitimer les méthodes répressives utilisées pour museler l'opposition et faire pression sur la population, à un mois d'un référendum constitutionnel très contesté", ajoute-t-elle, au sujet du vote du 17 mai visant à modifier la Constitution pour permettre au président de potentiellement rester au pouvoir jusqu'en 2034.

La crise burundaise, sur laquelle la Cour pénale internationale a ouvert une enquête, a fait au moins 1.200 morts et plus de 400.000 déplacés.

Avec AFP