L'UE se tourne à nouveau vers l'Afrique pour freiner les migrations

African Migrants Project Banner/Photo

La Commission européenne doit dévoiler mardi un nouveau plan face à l'afflux de migrants en Méditerranée, notamment depuis l'Afrique d'où viennent la plupart des hommes et femmes qui ont entrepris la périlleuse traversée jusqu'aux côtes de l'UE ces dernières semaines.

Le projet sera présenté dans l'après-midi par le vice-président de la Commission Frans Timmermans et par la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini, devant les eurodéputés réunis en session plénière à Strasbourg.

Ses détails ne sont pas encore connus, mais il "prévoit d'utiliser les fonds européens pour promouvoir l'investissement privé dans les pays d'origine des migrants, en particulier en Afrique", selon un document du Parlement.

Pour faciliter les renvois de migrants vers leurs pays, quand ils ne peuvent pas prétendre au statut de réfugiés, la Commission veut aussi "accélérer la négociation d'accords de réadmission avec des pays clés", africains mais aussi asiatiques comme le Pakistan et l'Afghanistan.

Pour ne pas donner l'image d'une Europe forteresse, elle devrait également préciser ses pistes pour promouvoir la migration légale, en particulier de candidats hautement qualifiés, via le système dit de "carte bleue".

Les propositions de l'exécutif européen doivent préparer le terrain avant le sommet des Etats membres de l'UE prévu fin juin à Bruxelles, lors duquel sont attendues de nouvelles décisions face à la crise migratoire.

Elles visent les "causes profondes" de la migration, en tentant de donner aux Africains des perspectives d'avenir chez eux, via le financement de projets concrets, et en poussant les pays d'origine à participer à la maîtrise des flux vers une Europe déstabilisée par la crise migratoire.

Cette ambition était déjà celle du sommet de La Valette, qui avait réuni en novembre à Malte des dirigeants des deux continents. L'UE avait alors mis sur la table un fond de 1,8 milliard d'euros, à compléter par ses Etats membres.

- L'Italie en première ligne -

Mais les résultats ne sont pas encore tangibles. Et depuis que l'immense afflux de migrants venant de la Turquie s'est tari, grâce au fragile accord entre l'Union et Ankara conclu en mars, la route maritime depuis l'Afrique est redevenue la principale porte d'entrée en Europe.

Le mois d'avril dernier a ainsi marqué un tournant avec, pour la première fois depuis juin 2015, davantage de migrants arrivés par la mer en Italie qu'en Grèce.

Contrairement aux migrants passant par la Turquie, des Syriens fuyant la guerre pour la plupart, les plus de 47.000 migrants arrivés en Italie depuis janvier relèvent pour la plupart aux yeux des Européens du statut de migrants économiques, à renvoyer.

Or moins de 40% des migrants irréguliers ayant reçu dans l'UE l'injonction de retourner dans leur pays le font effectivement, selon des chiffres datant de 2014, en partie en raison d'un manque de coopération et de moyens des pays d'origine pour reprendre leurs ressortissants.

En première ligne, Rome est l'une des capitales inspiratrices du nouveau projet que doit dévoiler la Commission, ont assuré plusieurs sources européennes, citant le plan récemment proposé par le chef du gouvernement italien Matteo Renzi, baptisé "migration compact".

Il faut "un grand pacte euro-africain en échange de grands investissements, mais alors là vraiment de grands investissements, car les 1,8 milliard d'euros (promis à) La Valette, c'est trop peu", a expliqué à la mi-mai à l'AFP le vice-ministre italien Mario Giro, en charge des questions africaines.

Selon M. Giro, Matteo Renzi et la chancelière allemande Angela Merkel ont évoqué ensemble des investissements structurels d'une valeur de 10 milliards d'euros dans les pays africains d'où proviennent la majorité des migrants.

La dernière semaine de mai a vu plus de 13.000 migrants sauvés dans le canal de Sicile. Mais tous n'ont pas eu cette chance : près de 2.500 ont trouvé la mort sur les itinéraires méditerranéens de janvier à fin mai, dont plus de 2.000 en Méditerranée centrale, selon l'Organisation internationale des migrations (OIM).

Avec AFP