La bataille pour les milliards des paris sportifs a commencé aux Etats-Unis

La coupe du Super Bowl gagné à Minneapolis, le 4 février 2018.

La décision de la Cour suprême d'autoriser les paris sportifs aux Etats-Unis a ouvert la porte d'un nouveau marché qui aiguise les appétits de plusieurs Etats et d'opérateurs privés, lancés dans une course effrénée pour s'octroyer une part de ce gâteau de plusieurs milliards de dollars.

Super Bowl, tournoi universitaire de basket (March Madness), playoffs du championnat de hockey NHL, des millions d'Américains pourront bientôt miser, dans leur Etat, sur les grands rendez-vous du sport américain.

Ce n'est plus une question d'années ou de mois, mais de jours. Mardi, un champ de course du New Jersey a annoncé qu'il commencerait à prendre les paris dès le 28 mai.

Après un quart de siècle d'interdiction, les paris sportifs reviennent dans le paysage de 49 Etats américains, qui vont désormais pouvoir concurrencer le Nevada, seul refuge des joueurs jusqu'ici.

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Lundi, le sénateur républicain Orrin Hatch a indiqué qu'il présenterait bientôt une proposition de loi au Congrès encadrant les pratiques au niveau national de ce qui va devenir le plus grand marché mondial de paris sportifs légaux au monde.

Mais plusieurs observateurs, comme Jeremi Duru, professeur de droit à l'American University et spécialisé dans le droit du sport, doutent de la capacité de Washington à légiférer rapidement sur ce sujet, alors que les Etats sont déjà lancés à pleine vitesse.

Ici et maintenant

Avant la décision, six Etats avaient déjà voté des lois leur permettant de se lancer en quelques semaines ou quelques mois, à commencer par le New Jersey, à l'origine de la saisine de la Cour suprême.

Dans cet Etat, deuxième grand foyer du jeu qui comprend notamment Atlantic City, "ils y pensent depuis plus longtemps que tous les autres, à part le Nevada", explique Michelle Minton, du groupe de réflexion Competitive Enterprise Institute et auteure d'une publication sur le sujet.

Lundi, Jason Settlemoir, manager général du champ de courses du Meadowlands (New Jersey), situé à moins de 15 km de New York, a indiqué à l'AFP viser une ouverture pour le début de la saison de football américain, le 6 septembre.

Son concurrent Monmouth Park, situé sur la côte, prévoit d'ouvrir dès le 28 mai l'officine construite il y a quatre ans déjà en partenariat avec le géant britannique des bookmakers, William Hill, qui se positionne.

Pour chaque Etat, les deux questions essentielles sont le taux d'imposition et la place qui sera octroyée aux paris en ligne.

Le New Jersey, qui veut préserver ses casinos et ses champs de courses, semble prêt à choisir un taux d'imposition sensiblement supérieur pour les paris sur internet, pour éviter qu'ils ne captent une trop grande part du marché.

Ces différents curseurs, encore en discussion partout, seront essentiels dans le positionnement de chaque Etat pour attirer à lui le plus de joueurs, en ligne et sur le terrain.

Nevada et Vegas

De ce point de vue, le Nevada et Las Vegas restent idéalement placés avec un taux d'imposition plus bas que ce qui serait proposé ailleurs, soit 6,75% des revenus tirés des paris.

Le cabinet spécialisé Eilers and Krejcik estime à 32 le nombre d'Etats qui proposeront des paris sportifs à moyen terme, avec un chiffre d'affaires évalué à quelque 6 milliards de dollars d'ici 2023.

Si les 50 Etats du pays se lançaient dans la compétition, les revenus pourraient atteindre, selon la même source, 16 milliards de dollars à la même échéance, pour un montant joué annuellement de 245 milliards de dollars.

Longtemps, les grandes ligues américaines se sont opposées aux paris sportifs de peur que la corruption ne s'infiltre dans les compétitions, poussant à leur interdiction au début des années 90.

Mais, alors que ces paris se sont banalisés dans le reste du monde, elles font désormais preuve d'ouverture et lorgnent sur ce pactole dont elles aimeraient bien toucher leur part.

Elles poussent pour que soit intégrée à toute législation, au niveau fédéral de préférence, une "indemnité d'intégrité" (integrity fee), un pourcentage des revenus tirés des paris qui leur reviendrait.

Un scénario improbable, selon Michelle Minton et Jeremi Duru, vu l'hostilité affichée des Etats et des professionnels du jeu.

Certains soulignent, notamment le propriétaire des Dallas Mavericks Mark Cuban mardi, que le simple fait de légaliser les paris va booster l'industrie du sport.

"Je pense que tous ceux qui détiennent une équipe professionnelle dans les quatre sports majeurs (football américain, basket-ball, baseball et hockey) viennent de voir la valeur de leur équipe doubler," a-t-il confié à la chaîne CNBC.

Avec AFP