La France avance ses pions sur le marché des étudiants étrangers

Najat Vallaud-Belkacem, ministre français de l’éducation, à l’époque où elle était aussi le porte-parole du gouvernement, le 17 mai 2012 à l’Elysée, Paris, France. (AP /Michel Euler)

Les étudiants étrangers ? Une "manne économique" et "des ambassadeurs de demain", assure la France, qui tente de tirer son épingle d'un jeu international de plus en plus en plus compétitif, dominé par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne

Le nombre d'étudiants qui effectuent une partie ou toutes leurs études dans un autre pays que le leur a doublé depuis l'an 2000 et approche actuellement les 4,5 millions dans le monde, selon l'OCDE et l'Unesco.

Une manne dont profite la France, où le nombre d'étudiants étrangers a connu une forte hausse depuis l'an 2000: +77%, à quelque 300.000 jeunes actuellement, qui effectuent leur rentrée en ce début octobre.

La France, ancienne puissance coloniale, continue d'attirer une grande majorité d'Africains (24% du Maghreb et 20% du reste du continent) et souhaite diversifier les origines des étudiants étrangers.

Dans le viseur: les étudiants chinois, indiens ou encore sud-coréens qui continuent de privilégier les pays anglo-saxons, notamment pour des raisons linguistiques ou pour la réputation de leurs universités. En tête des classements, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne accueillent respectivement 19% et 10% des étudiants étrangers dans le monde.

Avec 6% de parts de marché, la France, elle, est au coude à coude avec l'Australie, qui a le double avantage d'être un pays anglophone et de bénéficier de l'immense bassin asiatique, explique Didier Rayon, directeur des études à Campus France, l'organisme chargé de promouvoir l'enseignement supérieur français à l'étranger.

Canberra a lancé au printemps une stratégie à dix ans pour attirer encore plus d'étudiants étrangers et compte faire de ce secteur l'un de ses piliers de croissance pour rééquilibrer une économie fortement dépendante de l'industrie minière.

La France a elle aussi beaucoup à gagner sur ce terrain. L'apport économique de ces étudiants est chiffré à quelque 4,65 milliards d'euros par an (frais d'inscription, dépenses courantes, visites des familles...). En retranchant les coûts de leur formation, le solde net s'élève à 1,7 milliard d'euros.

"On s'y retrouve très vite", note M. Rayon, en évoquant les bénéfices ultérieurs: "Ces jeunes, de retour chez eux, deviennent des ambassadeurs de notre pays et des relais d'opinion", voire des oreilles attentives lors des négociations de gros contrats commerciaux. Mais "il faut gagner sa place, la compétition est de plus en plus difficile".

- Une législation plus favorable -

Depuis 2013, la France a pris des mesures pour compenser ses handicaps: la langue française, la difficulté à obtenir des visas et, plus globalement une bureaucratie jugée trop lourde.

Une loi autorise ainsi la tenue de cours en anglais dans les écoles et les universités, les étudiants étrangers peuvent travailler à mi-temps et les titulaires d'un master bénéficient d'une autorisation de séjour de 12 mois à l'issue de leurs études pour trouver un travail. Des règles supérieures aux normes européennes.

A Paris, qui accueille 60.000 des 300.000 étudiants étrangers venus en France, la Cité universitaire internationale améliore chaque année son dispositif de "guichet unique", qui permet aux jeunes étrangers de conduire toutes leurs démarches administratives sur un seul lieu.

"On a besoin de communiquer là-dessus", reconnaît toutefois Carine Camby, déléguée générale de la Cité, de retour d'une mission dans les universités de Montréal et de Toronto au Canada.

Mais la France a aussi des atouts, à commencer par la réputation de son art de vivre et des frais d'inscription très faibles dans les universités (184 euros en licence, 256 en master). Ses chercheurs reconnus, notamment dans les matières scientifiques, attirent aussi dans leurs labos des doctorants du monde entier.

Bémol, les attentats de Paris en 2015 (147 morts) ont suscité des inquiétudes chez les postulants, mais cela n'a duré que quelques mois, assure Carine Camby.

Un étudiant en licence informatique à Paris admet ainsi que "bien sûr, (sa) mère, en Algérie, se fait du souci". "Mais elle pense surtout à mon avenir!", ajoute-t-il.

Avec AFP