La fusillade de Charleston, déplorée par Obama, rappelle un attentat d’il y a 50 ans

U.S. President Barack Obama (R) delivers remarks in reaction to the shooting deaths of nine people at an African-American church in Charleston, South Carolina, from the podium in the press briefing room of the White House in Washington, June 18, 2015.

Le président Obama a condamné jeudi le meurtre de neuf personnes dans l’église Emmanuel de Charleston, en Caroline du Sud, "lieu sacré dans l'histoire de Charleston et dans l'histoire de l'Amérique".

"Le fait que cela ait eu lieu dans une église noire soulève évidemment des questions sur une page sombre de notre histoire", a affirmé Barack Obama.

Le président américain a évoqué la mort, il y a 50 ans, de quatre petites filles dans un attentat à la bombe contre une église à Birmingham, en Alabama (Sud), appelé depuis "Bloody Sunday".

Ce "Bloody Sunday" avait provoqué des manifestations dans la ville de Selma toute proche, où M. Obama s'est rendu en mars, affirmant que la marche contre le racisme aux Etats-Unis n'était "pas terminée".

Qualifiée de "mère Emanuel" par beaucoup de fidèles, l'Emanuel African Methodist Episcopal Church (AME), située au centre-ville de Charleston, en Caroline du Sud (sud-est), a joué un rôle important dans la ville, en tant que lieu spirituel et de rassemblement de ses habitants noirs.

"Il y a quelque chose de particulièrement déchirant de voir une tuerie dans un lieu où on cherche le réconfort", a noté le président.

Il existe plusieurs dizaines de ces églises AME aux Etats-Unis, fondées par des Noirs en réaction aux églises méthodistes blanches qui refusaient de les accueillir.

Dans les années 1700, des esclaves ont commencé à s'y rassembler pour prier avec d'anciens esclaves, mais l’église a été formellement constituée en prenant le nom de Emanuel AME en 1816.

Elle était à l'époque l'une des plus grandes congrégations AME du pays.

- Sortir de l'esclavage -

Mais les autorités de la ville l'ont ensuite fermée à deux reprises arguant de violations des lois, très sévères, qui régissaient les rassemblements des esclaves à l'époque.

Un des fondateurs de l'église, Denmark Vesey, ancien esclave qui avait acheté sa liberté, a tenté d'y organiser un soulèvement en 1822.

Il avait planifié, avec d'autres anciens esclaves, de tuer des propriétaires blancs de Charleston, pour libérer les esclaves et les envoyer par bateau en Haïti.

Mais le complot a été déjoué avant son exécution, et Vesay et ses complices ont été pendus.

L'église est brûlée et les fidèles doivent se rassembler dans le sous-sol jusqu'après la fin de la Guerre civile en 1865.

Cette église a été "fondée par des Noirs qui cherchaient la liberté", a rappelé M. Obama. "C'est une église qui a été réduite en cendres parce que ses fidèles essayaient de sortir de l'esclavage. Et quand la loi a interdit aux fidèles (de s'y rassembler), ils se sont réfugiés au sous-sol", a-t-il ajouté.

L'église reconstruite est de nouveau détruite par un tremblement de terre en 1886, puis restaurée à nouveau d'une manière flamboyante, avec de très hauts plafonds et un ancien orgue importé d'Europe.

Elle devient une halte obligatoire pour tous les militants des droits civiques, y compris leur leader Martin Luther King Jr.

Les militants des droits civiques "ont démarré des manifestations depuis les marches de cette église", a rappelé M. Obama.

Comme la plupart des églises AME, elle reste une paroisse essentiellement fréquentée par des Noirs, malgré l'ouverture des autres églises chrétiennes aux fidèles noirs.

L'église, située dans le quartier historique de Charleston, est un lieu très visité.

Devenue un lieu de rassemblement et un lien social fort pour la communauté noire, il n'est pas rare de voir ses fidèles s'y rassembler les dimanche et mercredi soirs, pour étudier la bible.

C'est à l'une de ces réunions mercredi soir, qui est ouverte aux visiteurs, incités à y participer, que s'est présenté le tueur. Il est resté une heure aux côtés des fidèles avant de tirer et d'en tuer neuf d'entre eux.

Avec AFP