Un tribunal nigérian a rejeté une action en justice visant à autoriser les Nigérians à voter en dehors du pays lors de l'élection présidentielle du 25 février. Cette décision signifie que des millions de Nigérians vivant à l'étranger devront rentrer au pays s'ils veulent exercer leur droit de vote.
Tout est parti d'une plainte introduite par deux Nigérians vivant en Grande-Bretagne qui demandaient au tribunal de reporter l'élection afin de permettre aux millions de leurs compatriotes vivant hors du pays de pouvoir s'inscrire sur les listes électorales et de voter dans les ambassades et les consulats.
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Dans sa décision rendue le 15 février, le tribunal, tout en se disant sensible à la cause, a rejeté la plainte, expliquant que selon la Constitution seuls les électeurs inscrits et "résidant au Nigeria" ont le droit de voter. Par ailleurs, a précisé la Cour, c'est aux législateurs - et non aux tribunaux - qu'il revient de changer la loi pour permettre aux membres de la diaspora de voter.
Selon les lois en vigueur, les Nigérians vivant à l'étranger peuvent voter, mais uniquement s'ils ont une adresse au Nigeria et s'ils se présentent en personne à un bureau de vote dans le pays.
Pour sa part, la Commission électorale nationale indépendante du Nigeria (INEC) dit n'avoir aucune marge de manœuvre.
"La position de la commission a été très claire dans cette affaire. La commission soutient le vote de la diaspora, mais nous avons clairement indiqué que le vote de la diaspora ne peut avoir lieu dans le cadre juridique électoral existant", a déclaré Festus Okoye, président du comité d'information et d'éducation des électeurs au sein de l'INEC.
Déception et menace de recours
Le verdict de la Cour a suscité une vague de déception au sein de la diaspora. "Je me sens triste, j'aurais vraiment aimé voter et voter pour mon candidat préféré parce que c'est une élection très cruciale et le Nigeria est à un point de basculement où nous avons besoin d'un bon leadership pour l'avenir", a déploré via un appel Zoom Paterson Mgbeoji, un programmateur musical vivant en Grande-Bretagne.
En 2017, le gouvernement d'Abuja estimait que 17 millions de ses ressortissants vivaient à l'étranger, tous ages confondus. Selon la Commission des Nigérians de la diaspora, basée à Abuja, les Nigérians de l'étranger ont envoyé plus de 20 milliards de dollars dans leur pays en 2021, soit le montant le plus élevé d'Afrique subsaharienne. Mais malgré leur contribution à la croissance économique du pays, la diaspora a du mal à obtenir l'autorisation de voter.
Il y a un an, les parlementaires nigérians avaient rejeté un projet de loi qui visait à autoriser le vote de la diaspora depuis l'étranger. Pour Nelson Olanipekun, un avocat nigérian spécialisé dans les droits de l'homme et fondateur du groupe de justice sociale Citizen Gavel, ce geste n'avait rien de surprenant.
"Les membres de la diaspora ne peuvent pas être facilement influencés par les politiciens nigérians et il me semble que c'est la raison pour laquelle les politiciens refusent de modifier la loi pour permettre cette disposition", a-t-il confié à la VOA via une application de messagerie.
L'un des plaignants déboutés en justice, Kenneth Nkemnacho, a indiqué sur Facebook qu'un appel sera déposé auprès d'une cour supérieure.
Pour rappel, 18 candidats sont en lice pour l'élection présidentielle du 25 février. Parmi eux: l'ancien vice-président Atiku Abubakar, l'ex-gouverneur de l'État de Lagos, Bola Ahmed Tinubu, et l'ancien gouverneur de l'État d'Anambra, Peter Obi.