La justice sud-africaine évoque une procédure de destitution du président Zuma

Le président Jacob Zuma lors de son adresse au Parlement à Cape Town, Afrique du Sud le 2 Novembre 2017. REUTERS/Sumaya Hisham

La plus haute juridiction d'Afrique du Sud a reproché vendredi au Parlement de ne pas avoir demandé des comptes au président Jacob Zuma sur un scandale provoqué par la rénovation de sa résidence privée aux frais du contribuable, un jugement qui pourrait déboucher sur une procédure de destitution.


"Nous concluons que l'Assemblée nationale n'a pas demandé des comptes au président", a déclaré la Cour constitutionnelle dans un jugement retransmis par les principales chaînes de télévision. "L'échec de l'Assemblée nationale à établir des règles sur la manière de forcer le président à un retrait (...) constitue une violation" de la Constitution, a ajouté le juge Chris Jafta.

Le tribunal a ordonné aux députés "de mettre en place un mécanisme qui pourrait être utilisé pour la destitution du président de sa charge". Les députés "doivent se conformer" à la loi fondamentale et élaborer à cette fin des mesures applicables "sans délai", a-t-il souligné.

L'opposition avait saisi la Cour constitutionnelle, reprochant au président du Parlement de ne pas avoir instauré les processus et mécanismes adaptés pour demander des comptes au président Zuma qui n'avait pas mis en oeuvre les recommandations du gendarme anti-corruption de l'Afrique du Sud en 2014.

Les recommandations portaient sur la rénovation de la résidence de campagne de M. Zuma dans la province du KwaZulu Natal pour quelque 15 millions de dollars pris sur des fonds publics.

Le scandale a connu son apogée l'an dernier quand la Cour constitutionnelle a décrété M. Zuma coupable d'avoir violé son serment présidentiel en refusant de rembourser.

Devant les critiques dans l'opinion publique et des décisions de justice, le président avait finalement accepté de verser 500.000 dollars, une somme fixée par le Trésor.

- 'Comme Saddam Hussein dans son trou' -

A la tête de l'Etat depuis 2009, Jacob Zuma a démissionné la semaine dernière de la présidence du parti au pouvoir, l'ANC, après des années de pouvoir marquées par une série de scandales et condamnations judiciaires. Le jugement de vendredi devrait encore ajouter à la pression qui s'est accumulée sur lui pour une démission alors qu'il reste en principe président de l'Afrique du Sud jusqu'aux prochaines élections de 2019.

Dans une première réaction au jugement de vendredi, le secrétaire général adjoint de l'ANC, Jessie Duarte, a déclaré que le parti qui a essuyé un échec électoral aux municipales l'an dernier en prenait note et "discuterait de toutes ses implications" dans deux semaines, lors d'une réunion de sa direction prévue le 10 janvier.

Un des partis d'opposition qui a saisi la Cour constitutionnelle, le Congrès du peuple (COPE), a estimé que le jugement de vendredi avait affaibli le président Zuma et mis l'ANC sous pression d'agir contre lui.

"Il a atteint un point similaire à celui de (l'ancien président irakien) Saddam Hussein dans un trou et il n'a nulle part où aller sinon de sortir", a dit son dirigeant Mosiuoa Lekota.

L'Assemblée nationale a de son côté déclaré dans un communiqué "avoir déjà lancé un processus dans le cadre d'une refonte de ses règles" afin de mettre en place une procédure de destitution d'un président en exercice.

La semaine dernière, le vice-président de l'ANC, Cyril Ramaphosa, l'avait emporté dans la course à la succession de M. Zuma à la tête de la formation, au pouvoir depuis la fin de l'apartheid en 2004, en battant de justesse l'ancienne épouse du chef de l'Etat, Nkosazana Dlamini-Zuma. Il doit être le prochain chef de l'Etat si l'ANC remporte les élections de 2019.

Avec AFP