La lutte continue pour éliminer le trachome, maladie rendant aveugle

Une femme se lave le visage à Kajiado, au Kenya : la propreté du visage est un moyen de prévenir le trachome.

Le laboratoire pharmaceutique américain Pfizer a annoncé jeudi s'engager à poursuivre jusqu'en 2030 ses dons d'antibiotiques, déjà distribués massivement depuis deux décennies, notamment en Afrique, pour tenter d'éliminer le trachome, une infection oculaire contagieuse pouvant entraîner la cécité.

"Nous sommes si proches de là où nous devrions être, de l'élimination de cette maladie, que nous ne pouvions pas abandonner maintenant", a déclaré à l'AFP Caroline Roan, vice-présidente chez Pfizer. L'annonce a été faite à Kigali, au Rwanda, à l'occasion d'un sommet sur les maladies tropicales négligées.

Le trachome a rendu aveugles près de deux millions de personnes dans le monde et constitue la principale cause de cécité d'origine infectieuse, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS). La maladie est provoquée par une bactérie (chlamydia trachomatis), et se transmet via l'écoulement oculaire ou nasal de personnes infectées.

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Elle touche notamment les femmes, en contacts réguliers avec les enfants, qui constituent le réservoir de la maladie. Après des années d'infections répétées, les bords de la paupière peuvent se retourner et frotter la cornée de façon très douloureuse. Quelque 136 millions de personnes vivent encore dans des zones où le trachome est endémique.

Un programme lancé en 1998, avec la création de l'Initiative internationale contre le trachome (ITI), visait l'élimination de la maladie en 2020, mais cet objectif a été repoussé à 2030. Pfizer a d'ores et déjà donné plus de 900 millions de doses de cet antibiotique, l'azithromycine (nom de marque: Zithromax), administrées à quelque 300 millions d'individus au fil des ans, dans 40 pays.

Grâce aux progrès faits, le trachome ne représente plus un problème de santé publique dans 12 pays (Maroc, Ghana...) selon l'OMS. L'évaluation se fait par districts: si plus de 5% des enfants sont infectés, alors l'antibiotique est offert à toute la population locale, une fois par an, à la fois en traitement et en prévention.

"Certaines campagnes vont toucher 10 millions de personnes en une seule semaine", a déclaré à l'AFP Paul Emerson, directeur de l'ITI. "Nous avons eu de grands succès".

Le défi est aujourd'hui d'atteindre des populations isolées, parfois nomades, et de coupler le médicament à la promotion de mesures d'hygiène (se laver fréquemment le visage...) dans des zones où l'eau peut se faire rare. Aujourd'hui, les endroits où la maladie persiste se trouvent notamment en Ethiopie, au Kenya, en Tanzanie, au Soudan et Soudan du Sud, en République centrafricaine, mais aussi en Afghanistan.

"Les conflits sont un gros facteur" limitant les interventions, a souligné Paul Emerson. "Dans un monde parfait, sans aucune interruption de fonds et sans guerres, nous aurions probablement pu éliminer le trachome en 2020", a-t-il jugé. Selon Caroline Roan, le but de 2030 est "ambitieux, mais réaliste".