La Minusma a été créée en 2013 pour aider à stabiliser un Etat menacé d'effondrement sous la poussée jihadiste, protéger les civils, contribuer à l'effort de paix, défendre les droits humains... Mais la situation sécuritaire n'a cessé de s'aggraver.
"La Minusma est une opération de maintien de la paix là où il n'y a pas de paix à maintenir", résume le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres dans ce document remis aux membres du Conseil de sécurité et qui doit être publié prochainement.
Avec l'extension de son mandat en 2019 au centre du pays particulièrement touché par les violences, la mission, privée désormais du soutien d'opérations étrangères, notamment de la France qui s'est retirée en août dernier, "a fait de son mieux", mais "a été poussée au-delà de ses limites", note-t-il. Une situation qui a placé la Minusma dans une "situation délicate", "incapable de répondre aux attentes de la population malienne et de certains acteurs régionaux" et ainsi sujette à des "critiques persistantes".
Le rapport demandé par le Conseil de sécurité en juin – lors du renouvellement de la mission pour un an – estime ainsi que "la situation actuelle n'est pas viable" et propose trois séries d'options pour y remédier.
La première serait de lui donner les moyens d'assurer pleinement son mandat en augmentant ses effectifs militaires et policiers de 3.680 personnes, ou de 2.000 dans une version plus modeste. Mi-décembre, la mission comptait 12.388 militaires (contre 13.289 autorisés par le mandat) et 1.598 policiers (pour 1.920 autorisés).
"Retrait préjudiciable"
Mais cette première option requiert que "tous les paramètres" soient remplis. Parmi ces conditions, le secrétaire général cite des progrès dans la transition politique qui prévoit, après deux coups d'Etat militaires, le retour des civils au pouvoir en mars 2024, ainsi que la liberté de mouvement des Casques bleus alors que l'ONU dénonce les entraves imposées par les autorités maliennes.
Renforcer les effectifs soulève également le problème de trouver des troupes, alors que plusieurs pays contributeurs (avec un total de 2.250 Casques bleus) ont annoncé leur retrait de la Minusma, qui a payé un lourd tribut avec 165 morts depuis 2013.
Option inverse, "si les paramètres clés pour que la mission puisse opérer avec son mandat actuel ne sont pas remplis", le secrétaire général évoque le "retrait des unités en uniforme" et la transformation en "mission politique spéciale", avec une présence uniquement à Bamako.
Entre les deux extrêmes, le rapport propose un maintien du nombre de Casques bleus, mais la modification du mandat, avec la fermeture de certains camps ou une réduction de la présence dans le centre du pays.
Si Antonio Guterres ne recommande pas l'une ou l'autre des trois options soumises au Conseil de sécurité, il souligne que "l'objectif de la présence de l'ONU au Mali reste aussi pertinente qu'il y a dix ans". Voire davantage, en raison "des besoins immenses de protection d'innombrables civils, des exigences de la transition politique en cours et de la place centrale de la trajectoire du Mali dans la stabilisation du Sahel".
"Aucun effort ne devrait être épargné pour empêcher le renouvellement d'un cycle d'instabilité politique et la poursuite de la détérioration de la situation sécuritaire, humanitaire et des droits humains", plaide le secrétaire général. Il note d'ailleurs que la plupart des Etats membres et autres partenaires consultés, ont insisté sur le fait qu'un "retrait serait préjudiciable pour le Mali et la sécurité régionale", soulignant le "risque existentiel" posé par les groupes terroristes au delà de l'Afrique de l'Ouest.
Mais certains s'inquiètent du coût humain et financier de la mission au budget annuel de 1,2 milliard de dollars. "Le Mali est l'un des environnements opérationnels les plus difficiles pour le maintien de la paix", résume le rapport, soulignant la vaste zone d'opérations, l'état des infrastructures et les menaces "omniprésentes" des divers groupes sévissant dans la région.