Dimanche, les forces de sécurité de la République démocratique du Congo ont réprimé des messes dans des églises à coups de gaz lacrymogène et empêché des marches interdites organisées à l'appel d'un collectif catholique, faisant douze morts selon les organisateurs.
"Nous ne pouvons que dénoncer, condamner et stigmatiser les agissements de nos prétendus vaillants hommes en uniforme qui traduisent malheureusement, et ni plus ni moins, la barbarie", a déclaré le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya à la presse
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Dans un communiqué, l'épiscopat, qui ne donne pas de bilan précis mais parle de "mort d'hommes", demande "une enquête sérieuse et objective pour établir les responsabilités" et condamne "l'atteinte à la liberté de culte garantie dans tout État démocratique, la profanation de certaines églises et l'agression physique des fidèles dont les servants de messe et les prêtres".
Les marches de catholiques exigeaient l'application d'un accord de sortie de la crise née du maintien au pouvoir de Joseph Kabila, signé le 31 décembre 2016 et prévoyant l'élection fin 2017 d'un successeur. Le dernier mandat du président Kabila, au pouvoir depuis 2001. s'est achevé en décembre 2016 et la Constitution lui interdit de se représenter.
Mais l'accord, conclu entre le pouvoir et l'opposition sous l'égide des évêques, n'a pas été appliqué et un nouveau calendrier, récusé par l'opposition et la société civile, prévoit maintenant des élections à la fin de cette année.
"Comment ferons-nous confiance à des dirigeants incapables des protéger la population, de garantir la paix, la justice, l'amour du peuple ?", s'est interrogé le cardinal Monsengwo qui a joué un rôle de premier plan dans l'histoire de la RDC depuis la décennie 1990.
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"Il est temps que la vérité l'emporte sur le mensonge systémique, que les médiocres dégagent et que règnent la paix, la justice en RD Congo", a-t-il lancé.
- Climat de "panique" -
De son côté, la France s'est dite "préoccupée par les violences" et a souligné que le droit de manifester pacifiquement était "une composante essentielle de la démocratie". Dans un communiqué, le ministère des Affaires étrangères "appelle à la tenue effective des élections conformément au calendrier électoral publié le 5 novembre 2017", qui prévoit l'organisation de la présidentielle le 23 décembre 2018.
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En RDC, le bilan même de la répression des dernières manifestations a provoqué une polémique entre la police qui dit qu'"aucun mort" n'a été enregistré et d'autres sources qui font état de victimes.
"Une douzaine de morts a été répertoriée : 11 à Kinshasa et un à Kananga" dans le centre du pays, a déclaré un porte-parole des organisateurs, Jonas Tshiombela.
L'ONU a de son côté fait état d'une "violente répression" qui a occasionné "la mort d'au moins cinq personnes, plusieurs blessés et l'arrestation de plus de 120 personnes".
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La police a rétorqué que les morts n'étaient pas des manifestants mais des "pillards" et des "bandits" tués loin des lieux des manifestations. Le gouvernement a fait état d'un policier tué le même jour dans "l'attaque" d'un commissariat de police.
Enfin, l'internet a été rétabli dans la nuit de lundi à mardi, après trois jours d'interruption décidée par les autorités à la veille des marches.
Selon l'archevêque de Kinshasa, le climat politique en RDC est caractérisé par "un regain de peur et d'énervement, d'incertitude sinon de panique".
Avec AFP