La Turquie enquête contre deux procureurs américains

Combinaison de photos montrant le procureur général Michael Mukasey, à gauche, au US Holocaust Memorial Museum à Washington le 16 décembre 2008 et l'ancien maire de New York, Rudy Giuliani, lors d'un rencontre avec le président Donald Trump, le 20, 2016, à Bedminster, New Jersey.

Le parquet d'Istanbul a ouvert une enquête samedi contre deux procureurs américains liés à l'affaire Reza Zarrab, un homme d'affaires turco-iranien dont le procès prévu fin novembre aux Etats-Unis pour avoir enfreint les sanctions contre l'Iran irrite Ankara.

D'après l'agence de presse étatique turque Anadolu, le parquet d'Istanbul enquête sur Preet Bharara, ex-procureur fédéral supervisant le district sud de l'Etat de New York et ayant chapeauté l'arrestation de M. Zarrab l'an dernier, ainsi que sur son successeur, Joon Kim.

Dans un document cité par Anadolu, le procureur général d'Istanbul s'intéresse aux façons dont ont été obtenus des éléments à charge contre des "citoyens turcs", en référence à M. Zarrab et au banquier turc Mehmet Hakan Atilla, tous deux accusés par la justice américaine d'avoir violé l'embargo avec l'Iran. Il mentionne notamment "des enregistrements sonores".

Le procureur général d'Istanbul estime que les éléments récoltés par les procureurs new-yorkais sont "volés, contrefaits et proviennent de source inconnue", ajoutant que les conditions de leur obtention étaient "clairement en violation du droit international".

L'ouverture de cette enquête turque survient à moins de deux semaines du procès à New York de MM. Zarrab et Atilla.

L'affaire Zarrab a contribué à tendre davantage les relations déjà houleuses entre Ankara et Washington et la tension monte en Turquie à l'approche de ce procès qui pourrait potentiellement donner lieu à des révélations embarrassantes pour Ankara. D'autant plus que des médias rapportent que M. Zarrab a décidé de coopérer avec la justice américaine.

En décembre 2013, M. Zarrab avait été arrêté et détenu pendant plus de deux mois en Turquie dans le cadre d'un retentissant scandale de corruption visant le cercle rapproché de M. Erdogan. La justice turque lui reprochait de s'être livré à un trafic illicite d'or avec l'Iran, facilité par des ministres du gouvernement islamo-conservateur d'Ankara.

Les charges avaient été abandonnées et les procureurs supervisant l'affaire purgés.

La nouvelle arrestation de M. Zarrab lors d'une visite aux Etats-Unis en 2016, ainsi que celle, en mars, de M. Atilla, a ulcéré le président turc Recep Tayyip Erdogan.

Les dirigeants turcs affirment que l'affaire Zarrab-Atilla est pilotée par le réseau de Fethullah Gülen, un prédicateur turc exilé aux Etats-Unis désigné par Ankara comme le cerveau du putsch manqué du 15 juillet 2016, ce que nie l'intéressé.

Ainsi, le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Cavusoglu, a déclaré vendredi que le procureur américain Bharara était "affilié" au réseau de M. Gülen. "Le ministre turc des Affaires étrangères est un menteur. Attendons de voir ce qu'il se passe au tribunal", a répondu M. Bharara sur Twitter.

Avec AFP