Le Burkina se dote d'un gouvernement de 25 ministres pour diriger la transition

Le Lieutenant-colonel Paul-Henri Damiba, Ouagadougou, le 6 mars 2022 (VOA/Lamine Traoré)

Le président de la transition au Burkina Faso, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, a nommé samedi soir un nouveau gouvernement composé de 25 ministres, pour diriger le pays pendant une transition de trois ans.

Le général Barthélémy Simporé, déjà ministre de la Défense sous Roch Marc Christian Kaboré, le président renversé par un coup d'Etat militaire fin janvier, conserve son poste, selon un décret publié samedi soir. Il est même élevé au rang de ministre d'Etat.

Parmi les autres ministres, Yero Boly, plusieurs fois ministre dans différents gouvernements de l'ex-président Blaise Compaoré, est nommé ministre d'Etat auprès du président du Faso, chargé de la Cohésion sociale et de la Réconciliation nationale.

Des leaders de la société civile et des syndicats dont Lionel Bilgo (Education nationale et alphabétisation) et Bassolma Bazié (Fonction publique) font également leur entrée dans le gouvernement.

Six femmes figurent dans ce gouvernement, dont Olivia Rouamba à qui échoit le portefeuille des Affaires étrangères.

Une vue des participants aux assises nationales ayant décidé le nombre de 25 au maximum les membres du gouvernement, Ouagadougou, le 6 mars 2022 (VOA/Lamine Traoré)

Les attentes des Burkinabè

"Ces gens-là doivent travailler pour sauver le Burkina Faso. Notre pays depuis plus de six ans aujourd’hui a souffert et continue de souffrir. L’une des premières missions, c’est la reconquête du territoire national. Il faut faire en sorte que les déplacés au nombre de 1 million et demie de personnes retrouvent leurs villages d’origine. Que les écoles soient rouvertes, plus de 2500 écoles fermées, plus de 2000 morts. Comment faire le deuil de toutes ces personnes. Ceux qui ont eu la chance d’être appelés au gouvernement, tout ce qu’ils peuvent faire, c’est de mouiller le maillot pour sauver notre pays", a déclaré Marcel Tankoano, président du M21, un mouvement de la société civile.

"Personnellement je ne connais pas le Premier ministre. Il est méconnu du grand public burkinabè. Mais à travers son curriculum vitae on se rend compte que c’est un professeur burkinabè, c’est également un expert dans le domaine des entreprises et j’espère que ce profil va lui être profitable au moment où l’économie est en berne. Nous espérons qu’il puisse relever ce défi. On fait face à des défis importants. C’est un gouvernement hétéroclite, composé d’hommes et de femmes de tous âges. Il y a l’entrée de la jeunesse à travers Lionel Bilgo. Des anciens ténors comme l’ex ministre de Blaise Compaoré Yero Boly. Ils n’ont pas assez de temps, ils n’ont pas droit à l’erreur et ils ont le devoir de permettre au Burkina Faso de trouver son lustre d’antan", a déclaré Marc Bonogo, président de l’Alliance des nouvelles consciences, membre de la Coordination nationale pour une transition réussie, également membre du Réseau des jeunes leaders ouest-africains.

Les observateurs et analystes pensent que ce gouvernement prend en compte toutes les sensibilités de la société.

"On voit des personnes qui font leur entrée dans le gouvernemental ne s’attendait pas forcément. C’est le cas de Bassolma Bazié qui a été pendant longtemps le patron de la plus grande centrale syndicale du Burkina Faso. Aujourd’hui ce monsieur est un leader d’opinion. Cela va contribuer à donner du crédit à cette Transition. Au-delà de cela on voit d’anciens ministres comme Yero Boly qui revient pour la Réconciliation nationale. Mais on voit également des ministres de l’ancien gouvernement de Roch Kaboré notamment le ministre de La Défense et une ministre déléguée qui réintègre le gouvernement. On se dit que c’est un gouvernement qui prend en compte toutes les tendances. L’ancienne majorité, l’ancienne opposition, une partie du régime de Blaise Compaoré, des syndicats... En un seul mot, c’est un gouvernement qui prend en compte la plupart des différentes couches sociales, d’opinion du Burkina. On se dit que c’est un gouvernement qui est engagé pour la réconciliation nationale. C’est un gouvernement de technocrates. Le plus important, c’est ce qu’ils vont produire sur le terrain. Les Burkinabè sont désormais très exigeants sur les questions de sécurité et de gouvernance", a indiqué Paz Hien, juriste et analyste politique.

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Trois ans de transition pour le Burkina Faso

Lutte contre le jihadisme, une "priorité"

Jeudi, Albert Ouédraogo, un universitaire de 53 ans, avait été nommé Premier ministre.

Le nouveau chef de l'Etat burkinabè, le lieutenant-colonel Damiba, 41 ans, a pris le pouvoir fin janvier après deux jours de mutineries dans plusieurs casernes du pays, renversant le président élu Roch Marc Christian Kaboré accusé d'inefficacité face aux violences jihadistes qui minent le pays.

Le nouveau président a fait de la lutte contre le jihadisme et la refondation de l'état burkinabè sa "priorité".

La période de transition avant un retour à l'ordre constitutionnel a été fixée à trois ans, selon une charte signée par le lieutenant-colonel Damiba, qui lui interdit de se présenter aux élections prévues à la fin de la transition.

La durée des transitions est au cœur des négociations entre les pays de la région touchés par les putschs et la Communauté des Etats d'Afrique de l'ouest (Cedeao) qui réclame qu'elles soient les plus courtes possible.

La Cédéao a jugé "inacceptable" celle de cinq ans fixée par le Mali, et ne cesse de réclamer un calendrier à la Guinée qui refuse de se voir imposer un quelconque délai. Elle ne s'est pas encore prononcée sur le calendrier burkinabè.