Les proches de M. Kabila, qui sont majoritaires au parlement, se taillent la part du lion dans l'exécutif avec par exemple la Justice, les Finances et la Défense. Les partisans de M. Tshisekedi, proclamé vainqueur de l'élection du 30 décembre, empochent les Affaires étrangères et l'Intérieur.
Le président Tshisekedi a pu s'envoler avec le sentiment du devoir accompli vers Tokyo pour le sommet Afrique-Japon à Yokohama. L'Assemblée est réunie jusqu'au 7 septembre en session extraordinaire pour investir ce nouveau gouvernement.
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Seule réaction diplomatique de la journée, les Etats-Unis se sont dits "prêts à travailler avec le nouveau gouvernement pour faire avancer le partenariat privilégié U.S.-#RDC pour promouvoir la paix et la prospérité", par un tweet de leur ambassadeur à Kinshasa, Mike Hammer.
Les Congolais ont des attentes encore plus précises : "On l’attend dès ce lundi 2 septembre sur la rentrée scolaire, la gratuité de l’enseignement primaire, voilà le premier grand défi. Le deuxième grand défi c’est par rapport à la sécurité et à l’intégrité nationale", a résumé Nicolas Mwabi, fonctionnaire. La RDC fait également face à une épidémie d'Ebola dans l'Est.
Les négociations ont duré sept mois entre les forces politiques du nouveau chef de l'Etat, investi le 24 janvier, et celles de Joseph Kabila, qui reste l'autre homme fort du plus grand pays d'Afrique sub-saharienne gorgé de richesses minières.
Les discussions entre les deux camps ont "pris du temps", car il fallait "vider tout ce qui pouvait entraver le fonctionnement du gouvernement", a déclaré le Premier ministre, Sylvestre Ilunga, un économiste membre du Front commun pour le Congo (FCC), la coalition de Joseph Kabila.
Lire aussi : Le Premier ministre Ilunga attend des listes "corrigées" des candidats au gouvernementLe gouvernement comprend cinq vice-Premier ministre, dont deux sont aussi issus du FCC de Joseph Kabila: Célestin Tunda (Justice) et une femme, Elysée Munembwe (Plan).
Parmi les autres vice-Premier ministre figure un proche du chef de l'Etat, Gilbert Kankonde, qui reçoit le portefeuille de l'Intérieur.
Un cadeau empoisonné en cas d’interdiction ou de répression des futures manifestations en RDC, où l'élection de M. Tshisekedi est toujours contestée par l'opposition radicale réunie autour de Martin Fayulu.
Une femme à la tête de la diplomatie
Le gouvernement comprend "83% d'hommes et 17% de femmes. Ce pourcentage est encore faible, mais il faut le pondérer par l'importance des portefeuilles qui ont été attribués aux femmes", a détaillé le Premier ministre. "Ainsi nous avons une dame vice-Premier ministre, ministre du Plan et une dame ministre d'Etat, ministre des Affaires étrangères".
Cette nouvelle cheffe de la diplomatie congolaise s'appelle Marie Tumba Nzeza, membre de l'UDPS de Félix Tshisekedi. Deux autres femmes sont ministre d'Etat: Béatrice Lomeya (Genre) et Nene Nkulu (Emploi).
La liste gouvernementale surprend parfois même les fins connaisseurs de la vie politique et pour cause : "Ceux qui n’ont jamais été ministres représentent 76,97% de l'équipe", se félicite le Premier ministre, pour qui il s'agit de "la plus grande innovation".
Lire aussi : Les députés convoqués en session extraordinaire pour "l'investiture du gouvernement"Deux ministres ont déjà des dossiers chauds sur la table: à la Santé, le Dr Eteni Longondo, membre de l'UDPS de Félix Tshisekedi, doit gérer avec le chef de l'Etat l'épidémie d'Ebola qui a fait près de 2.000 morts en un an dans l'Est. Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, est attendu sur place samedi prochain.
A l'Enseignement primaire, Willy Bakonga, issu du PPRD de M. Kabila, doit mettre en oeuvre la mesure répétée par son prédécesseur samedi: la gratuité de l'enseignement primaire dans les écoles publiques dès la rentrée du 2 septembre. Coût de la mesure: 2,6 milliards de dollars, près de la moitié de l'actuel budget de l'Etat.
"Je crois que ca valait la peine d’attendre. Là, nous avons un gouvernement qui réalise la vision du chef de l'Etat, c’est la direction du changement. Donc, le changement commence maintenant! Mettons nous au travail!", a déclaré M. Ilunga.
Le gouvernement a été salué par la très influence Eglise catholique, qui veut "croire qu’on va dans une direction nouvelle".
La même conférence épiscopale avait émis des doutes sur la validité de l'élection de M. Tshisekedi, laissant entendre que le véritable vainqueur était Martin Fayulu.